"Ce vote est un encouragement à défendre, puis à mettre en œuvre au plus vite cette grande réforme de gauche, synonyme de progrès pour le quotidien de tous les Français ». Satisfaction de Marisol Touraine, à l’issue du vote solennel à l’Assemblée nationale. Sans surprise, le projet de loi sur la santé, dont la mesure phare est la généralisation du tiers payant a en effet été voté mardi après-midi par les députés avec une confortable majorité par 311 voix pour, 241 voix contre et 10 abstentions, même si la gauche n’a pas complètement fait le plein de voix. Le texte, qui a été défendu durant deux semaines par la ministre de la Santé comportait suffisamment de mesures symboles pour fédérer l’ensemble du PS, "frondeurs compris" : outre le tiers payant généralisé, le texte inclut des dispositions emblématiques comme la suppression du délai de réflexion pour l’IVG, l’expérimentation des salles de shoot, le rétablissement du service public hospitalier ou l’instauration du paquet neutre de cigarette. Autant de points très appréciés par le PS dont tous les élus sauf deux ont voté pour. Pour le groupe PS, Martine Pinville a expliqué concernant la réforme phare du projet : "le tiers payant généralisé est une avancée sociale pour tous les assurés sociaux, à commencer par les plus en difficulté (...) Renoncer à uneconsultation à 23 euros pour son enfant, c’est à la foi incacceptable et intolérable", a -t-elle martelé, satisfaite. Les écologistes ont tous voté le texte, leur coprésident François de Rugy, se disant satisfait les jours précédents qu'il n'y ait "pas eu de recul" sur le tiers payant. En séance,Jean-Louis Roumegas a toutefois émis un très léger bémol sur la généralisation du tiers payant qui "va dans le sns d’un meilleur accès aux soins, à condition de ne pas désagréger le panier de soins."
Tout le monde n’a pas voté le texte (6 sur 18 se sont abstenus) en revanche dans le groupe des radicaux de gauche, chagriné de la méthode utilisée sur le tiers payant et qui réclamait qu’on commence par des expérimentations : "Madame la ministre, il aurait fallu écouter les médecins (...) Il aurait fallu les rassurer," est venue expliquer à la tribune le Dr Dominique Orliac. Plus à gauche, seules deux élus sur 15 PC et Front de Gauche ont pour le reste voté la réforme Touraine. Patrice Carvalho a expliqué cette hostilité par les restrictions budgétaires affectant les hôpitaux et la médecine scolaire notamment.
"La médecine générale est en plein désarroi"
La droite et le centre ont bien entendu voté négativement. A commencer par les députés du principal groupe d'opposition. "La médecine générale en France est en plein désarroi," a expliqué Jean-Pierre Door qui a ajouté à l’intention de la ministre : "vous n’aimez pas la médecine libérale. Vous n’aimez pas les cliniques privées. Vous vous coupez de la jeunesse qui formera les médecins de demain !" L’élu de la région centre a surtout vilipendé "un article 18 irresponsable avec un tiers payant généralisé financièrement irréaliste et inflationniste." En cas d’alternance "cela sera immédiatement abrogé" a-t-il prévenu. Déçus, les centristes de l'UDI se sont aussi prononcés contre, le projet de loi ne s'attaquant pas, selon eux, aux sujets du "reste à charge" pour les assurés, de la sécurité sanitaire ou de la désertification médicale, comme l’a rappelé leur orateur Arnaud Richard. Et de dépeindre un texte "qui passe sous silence tous les grands défis auxquels notre système de santé est confronté."
Un peu avant le vote, quelques dizaines de médecins s’étaient rassemblés devant l'Assemblée nationale pour manifester leur colère face au projet de loi santé. Parmi eux, Jean-Paul Hamonet Eric Henry. "J'aimerais avoir un peu de temps pour soigner mon malade", résume le premier, président de la Fédération des médecins de France (FMF). "Ce n'est pas une loi de santé que les députés vont voter, c'est une loi de société" qui va "changer la vie des gens" et permettre à l'Etat d'être "branché sur nos comptes" et de pouvoir "ponctionner les franchises", a dénoncé le second, président du Syndicat des Médecins Libéraux (SML). De leur côté, l’Unof et MG Francepréparent des consignes de boycott du tiers payant.
Le projet de loi va maintenant partir pour le Sénat où la ministre de la Santé va surement avoir affaire à plus forte opposition. Le texte risque en effet d’en ressortir complètement retricoté par la Haute Assemblée. Mais par la suite, l’épreuve ne devrait pas durer trop longtemps pour Marisol Touraine. Elle a effet obtenu un timing serré via la procédure d’urgence qui interrompt la navette entre les deux assemblées. On s’oriente donc vers une dernière lecture pour la forme au Palais Bourbon qui aura le dernier mot sur un texte qui devrait donc être définitivement adopté en juillet. La seule surprise pourrait provenir à ce stade du Conseil constitutionnel que l’opposition a d’ores et déjà prévu de saisir.
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