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lundi 21 février 2022

Alice Diop nous raconte «Nous»

Interview Yannick Vely     Publié le 20/02/2022

La réalisatrice Alice Diop
La réalisatrice Alice Diop Tobias Schwarz/AFP-Pool/DPA/ABACAPRESS.COM

C'est le plus beau documentaire de ce début d'année, une exploration de la banlieue par le prisme du RER B qui offre un autre regard sur la société française que les raccourcis médiatiques. Nous avons interviewé la réalisatrice de «Nous», la passionnante Alice Diop. 

Paris Match. Quelle était la genèse du projet ?
Alice Diop. Au départ, il y avait ce livre de François Maspero, «Les Passagers du Roissy Express», que ma monteuse Amrita David, qui est aussi une amie, m’a offert il y a quelques années. En fait, je dois avouer que j'étais passée complètement à côté de la beauté, de la puissance et de la singularité de ce livre qui, par ailleurs, a marqué toute une génération de lecteurs. Cela a été un vrai phénomène littéraire quand il est sorti en 1989, parce que c'était la première fois que la banlieue était racontée par le biais de la littérature. Le temps que Maspero prenait à regarder ces gens, ces lieux, ces territoires, était en totale dissidence par rapport au récit de l'immédiateté médiatique dans lequel la banlieue était et est toujours malheureusement enfermée. Donc, il proposait un contre récit littéraire, poétique, en s’intéressant aux menus événements et à la banalité du quotidien. Encore une fois, quand on regarde la banlieue, quand on y va, c'est souvent pour parler de sempiternelle question des violences économiques et sociales, des problèmes de deal. Quand elle m'a offert ce livre il y a 20 ans, cela me racontait des choses que je vivais et dont j'avais à cœur de me défaire pour tenter de m’émanciper et d'échapper à ce destin social. Je commençais tout juste à faire du cinéma. Je sortais de mes études et j'avais tellement envie de quitter socialement la banlieue que je n'avais pas saisi la beauté singulière et poétique de son approche. Aujourd’hui, je me rends compte, vingt ans plus tard, que raconter la banlieue de cette manière-là est précisément politique. Parce que c'est un contre-récit qui vient faire vaciller les discours dominants, les images toutes faites. Ça ouvre le champ à un nouvel imaginaire et une nouvelle compréhension de ces gens, de ces territoires. Et en ça, c'est politique.

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