Paris, le samedi 26 septembre 2020 - Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, les scientifiques éprouvent le plus grand mal à établir des certitudes sur les facteurs de contamination ou de risque. Mais dans le même temps certaines affirmations sont demeurées constantes. Parmi ces points de repère, le constat selon lequel les personnes souffrant d’obésité sont plus souvent touchées par une forme grave du Covid-19, y compris chez les jeunes adultes entre 18 et 34 ans.
Récemment, c’est une étude publiée dans le Jama Internal Medecine qui révélait que les personnes souffrant d’obésité morbide (avec un indice de masse corporelle supérieur à 40) représentaient 41 % des malades atteints de Covid intubés ou morts aux Etats-Unis.
Fort logiquement, les personnes souffrant d’obésité devraient donc être considérées comme vulnérables car présentant un risque de développer une forme grave d'infection au virus SARS-CoV-2. Or, si c’est actuellement le cas pour les médecins, aux yeux du droit français, ce sujets ne bénéficient plus d’un régime de protection spécifique.
Un décret modifié en catimini
Quelques jours avant la levée du confinement national, le décret n°2020-521 du 5 mai 2020 est venu définir les critères permettant d’identifier les salariés vulnérables présentant un risque de développer une forme grave du Covid-19 et pouvant être placés en activité partielle. Dans cette liste figurait notamment les personnes de plus de 65 ans, celles ayant des antécédents cardio-vasculaires, les sujets atteints d’un cancer, d’une insuffisance rénale ou d'immunodépression, et enfin, les personnes présentant une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2).
Mais voilà. A l’approche de la rentrée, c’est un nouveau décret qui est venu modifier cette liste. Désormais, une personne obèse peut être placée en chômage partiel uniquement si elle est âgée de plus de 65 ans.
Un recours déposé
Une situation difficilement compréhensible au vue des données épidémiologiques les plus récentes et qui révolte la Ligue contre l’obésité. Dans les faits, les sujets obèses de moins de 65 ans se retrouvent dépourvues de la protection sanitaire offerte par le chômage partiel.
C’est dans ce contexte qu’un référé-liberté a été déposé devant le Conseil d’État. Cette procédure, définie à l’article L.521-2 du Code de Justice Administrative, permet une saisine en urgence du juge administratif en présence « d’une atteinte grave et manifestement illégale » portée par l’administration. En l’espèce, la haute juridiction pourrait considérer que ce décret va à l’encontre du droit à la santé défendu par le préambule de la constitution de 1946 ainsi que le droit à la vie proclamé par la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
En attendant la décision du Conseil d’État, il reste que les salariés atteint d’obésité pourraient être amenés à faire usage de leur droit de retrait, lorsque les conditions de travail apparaissent comme étant incompatibles avec toute distanciation sociale.
Passée inaperçue, cette modification est pourtant loin d’être anodine. D’après les statistiques émanant du bilan national de santé publique de 2018 (rédigé par le Ministère de la Santé !) 17 % de la population adulte est obèse, ce qui représente plus de 8 millions de personnes.
Charles Haroche
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