—
A l'entrée du centre Flora-Tristan du CHU d'Angers. Universal Images Group via Getty Images
En 2019, 232 200 avortements ont été enregistrés en France. Pour la première fois, des données montrent une corrélation nette entre niveau de vie et recours à l'interruption volontaire de grossesse.
Les 20-29 ans restent les plus concernées avec 27,9 avortements pour 1 000 femmes. Toutefois, l’étude relève une augmentation «notable» depuis dix ans chez les trentenaires, particulièrement chez les 30-34 ans (+3,9 points entre 2010 et 2019). «On stigmatise souvent l’avortement en disant qu’il serait surtout le fait de femmes jeunes. Ce chiffre est révélateur dans une société où la maternité est hyper mise en avant, où dans les pubs pour les tests de grossesse, on ne représente jamais une femme mécontente, par exemple. Cette donnée sur les trentenaires montre que des femmes peuvent aussi faire ce choix dans leur vie parce qu’elles ont une carrière professionnelle, que ce n’est pas le moment», analyse Sarah Durocher, pour qui «l’avortement concerne tout le monde», et pas seulement les femmes jeunes. Une diminution est d’ailleurs observée chez les moins de 20 ans. Pour les 15-17 ans, le taux de recours à l’IVG a chuté de 10,5 pour 1 000 jeunes filles en 2010 à 5,7 en 2019, chez les 18-19 ans, il a baissé sur la même période de 22,2 à 16,7.
Des disparités territoriales fortes
Cette étude met aussi en lumière des disparités territoriales fortes : le recours à l’avortement varie du simple au triple selon les régions. En métropole, le taux le plus faible est enregistré en Pays de la Loire (11,8 IVG) et le plus élevé en Provence-Alpes-Côte d’Azur (22,9). Outre-mer, la différence est encore plus marquée avec 39 avortements pour 1 000 femmes en Guadeloupe et en Guyane. «En métropole, les pyramides des âges sont trop semblables d’une région à l’autre pour justifier les disparités observées qui s’expliquent par des différences de comportement», note la Drees. Une analyse superficielle de la situation qui ne tient pas compte des différences de politiques territoriales sur le sujet, des déserts médicaux ou encore de la fermeture de services de santé de proximité, note le Planning familial. «La question de l’offre est centrale. L’avortement n’est pas juste lié à une loi. Il peut devenir un parcours de combattante, car il tient à très peu de personnels engagés et parfois très peu de structures. Si l’accès l’avortement est compliqué, certaines femmes vont se décourager dès le départ.»
Une question médicale et sociale
Pour la première fois, ces données sur l’IVG ont été analysées à l’aune de la situation sociale, puisqu’elles ont été associées aux données fiscales de 2016. Le constat est sans appel : les femmes les plus précaires y ont sensiblement plus recours. Les 10% ayant les niveaux de vie les plus élevés ont un taux pour 1 000 femmes inférieur de 11 points à celui des 10% aux revenus les plus faibles. Si les différences d’âge ou de statut matrimonial peuvent entrer en compte, «à groupe d’âge et situation conjugale donnés, les femmes dont le niveau de vie est classé parmi les 10% les moins élevés ont une probabilité de recourir à l’IVG dans l’année supérieure de 40% à celle des femmes ayant un niveau de vie médian», indique le communiqué. «C’est intéressant car on pose toujours l’IVG comme une question seulement médicale, indique Sarah Durocher avant de poursuivre. La question de garder une grossesse se pose différemment pour les femmes ayant des difficultés financières importantes, souvent plus isolées. Ces chiffres montrent que des déterminants socio-économiques importants peuvent interférer dans la décision d’avorter ou non.»
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire