Avec la place « de plus en plus importante » prise par les psychothérapies dans la prévention des conduites d’automutilation ou/et des tentatives de suicide, il est logique de s’interroger sur leur efficacité réelle. Cette question concerne en particulier les thérapies d’inspiration psychanalytique, parfois décriées (à l’heure du DSM hégémonique), pour leur approche très différente de l’actuelle « médecine fondée sur des preuves[1]. » Pour dépassionner le débat, et surmonter ainsi les antagonismes idéologiques sur la valeur accordée (ou refusée) à la psychanalyse, une équipe britannique a réalisé une revue systématique et une méta-analyse de la littérature médicale sur l’intérêt des psychothérapies, y compris analytiques, dans l’aide aux sujets tentés par l’automutilation ou le suicide. Cette recherche apprécie l’action des psychothérapies avec l’objectivité (garantie par la démarche statistique) identique à l’évaluation des traitements médicamenteux dans les essais thérapeutiques contrôlés.
La matière initiale était importante (3 290 articles) reflétant celle du sujet : on dénombre plus de 100 000 consultations annuelles dans les hôpitaux du Royaume-Uni pour des problèmes d’automutilation, et ce nombre « sous-estime pourtant l’acuité du phénomène car la plupart des actes d’auto-agressivité ne conduisent pas à l’hôpital ». Cependant, les auteurs ne retiennent finalement que 12 essais contrôlés répondant à leurs critères d’éligibilité. Cette méta-analyse permet de conclure que « les thérapies psychanalytiques et psychodynamiques se révèlent efficaces pour obtenir une réduction du nombre de tentatives de suicide » (OR [odds ratio] = 0,469 [intervalle de confiance à 95 % de 0,274 à 0,804]).
On observe aussi « la preuve d’une réduction significative de la répétition des actes d’automutilation pour un suivi de six mois, mais non pour un suivi de douze mois. » Malgré cette atténuation de l’effet de la psychothérapie au bout d’un an, on remarque également « des effets thérapeutiques significatifs sur l’amélioration du fonctionnement psychosocial et sur la réduction du nombre d’hospitalisations. »
Si cette étude plaide ainsi pour « une efficacité à court terme des psychothérapies psychanalytiques et psychodynamiques sur la réduction des comportements suicidaires ou d’auto-agressivité », et sur « l’amélioration du bien-être psychosocial », les auteurs estiment que « le petit nombre d’essais et la qualité modérée des preuves » incitent à proposer « d’autres études de meilleure qualité » pour confirmer ces résultats et pour «préciser quelles composantes spécifiques des psychothérapies sont efficaces. »
Dr Alain Cohen
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