Comme le poids économique des troubles psychiatriques représente un sujet d’une importance mondiale, il n’est pas étonnant que deux grandes revues l’évoquent presque en même temps. The Australian & New Zealand Journal of Psychiatry d’une part, dans un article sur le « coût de la prévalence élevée des maladies mentales » en Australie ; et d’autre part une publication du Journal of Affective Disorders consacrée au « poids économique du trouble bipolaire de type I aux États-Unis. »
Point commun entre ces deux articles : la retombée financière des maladies mentales. Elle ne se cantonne pas aux seules dépenses de santé et d’assurance-maladie, mais a aussi « un large impact économique » en termes de perte de productivité au travail, y compris cette conséquence (souvent méconnue) pour la collectivité : une perte d’impôts sur le revenu pour l’état, liée précisément à l’effet préjudiciable de la maladie sur l’aptitude professionnelle des patients, donc sur le niveau de leurs revenus.
Perte de productivité et de recettes fiscales
Et les estimations chiffrées de cette incidence économique se révèlent vertigineuses. En Australie (où l’étude porte sur l’impact financier des diagnostics « très fréquents » : troubles dépressifs, anxieux, ou liés à une addiction), cette perte de productivité annuelle est estimée à « 11,8 milliards de dollars australiens » (1 dollar australien valant environ 0,65€), un montant auquel viennent aussi s’ajouter chaque année « 1,23 milliards de pertes d’impôts sur le revenu et près de 13 milliards de prestations sociales » (welfare payments). Et aux États-Unis, les auteurs parlent d’un « fardeau économique » estimé, pour 2015, à « 202 milliards de dollars (américains, avec environ 1$ = 0,84€) correspondant à une moyenne de 81 559$ par individu. » Sans parler des coûts indirects, liés notamment à la perte d’emploi : moins de revenus pour les intéressés, et donc moins de rentrées fiscales pour l’état.
Si ces coûts sont déjà considérables, il faut rappeler que l’étude évoquée ici ne concerne pourtant que le seul trouble bipolaire de type I, soit environ 1 % de la population générale, avec toutefois un « impact élevé en matière de risque de suicide et de diverses comorbidités : affections respiratoires, diabète, maladies cardiovasculaires, SIDA, hépatite C. » Même si la recherche a un coût que certains gestionnaires à la vue courte estiment trop élevé, son développement se justifie donc aussi (indépendamment de l’aspect humain) par un retour sur investissement prévisible des progrès thérapeutiques en termes économiques.
Dr Alain Cohen
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