La DGOS a dévoilé des éléments des futurs textes règlementaires sur les projets territoriaux de santé mentale. La notion de territoire n'y serait volontairement pas définie, pour permettre aux acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux concernés de bâtir leur projet en fonction des nécessités et des besoins locaux.
À l'occasion d'une journée* nationale d'étude au ministère des Affaires sociales et de la Santé sur le thème "Territorialités, psychiatrie et santé mentale", Katia Julienne, directrice générale de l'offre de soins (DGOS) par intérim, a dévoilé ce 4 mai, des éléments du futur décret sur les projets territoriaux de santé mentale (PTSM). Ces PTSM, selon le nouvel article L3221-2 du Code de la santé publique introduit par la loi de Santé, doivent en effet organiser "l'accès de la population à un ensemble de dispositifs et de services répondant à des priorités définies par voie réglementaire". Ils devront associer, a rappelé la DGOS, les acteurs des différentes composantes de la prise en charge et de l'accompagnement — établissements de santé, médico-sociaux, médecins libéraux, psychologues, acteurs de la prévention, du logement, de l'insertion, etc. — ainsi que les représentants des usagers et de leurs proches. Et l'un des enjeux de la teneur des textes attendus — un décret et une instruction — est de savoir quelle définition et quel périmètre du territoire seront donnés dans ce cadre, étant donné que les acteurs de la psychiatrie publique, notamment, défendent la spécificité territoriale historique de la discipline reposant notamment sur la sectorisation.
Pas de norme territoriale définie par les textes
Dans le projet d'instruction dont Hospimedia a eu copie voilà quelques mois (lire notre dossier), la définition du territoire n'était pas encore tranchée. Les acteurs travaillaient avec les services du ministère sur la notion de territoire "suffisant". Il fallait naturellement s'assurer de la présence de l'ensemble des acteurs, soit celle d'un ou plusieurs établissements psychiatriques et de celle de services sociaux et médico-sociaux, dans la logique du parcours. À l'époque, à titre indicatif, le projet d'instruction se fondait sur un bassin de population d'environ 400 000 habitants, "plus ou moins la taille d'un département, à adapter selon le contexte urbain ou rural", couvrant "plusieurs conseils locaux de santé mentale lorsqu'ils existent" et un ou deux groupements hospitaliers de territoire. Ce 4 mai, la DGOS annonce que le projet de décret, élaboré dans le cadre du Conseil national de santé mentale, a été validé à l'unanimité par la Conseil national consultatif des personnes handicapées le 13 mars dernier. Katia Julienne a rappelé que le législateur a tenu à laisser le territoire du projet "à la main des acteurs, pour qu'ils puissent bien prendre en compte les priorités de chaque région". La loi précise un niveau territorial "suffisant" pour permettre l'association des acteurs concernés et l'accès à des modalités et techniques de prise en charge diversifiées, a-t-elle poursuivi. "Il est essentiel que ce territoire corresponde de manière concrète aux réalités des besoins liés aux parcours des personnes en souffrance psychique", a souligné la DGOS. D'ailleurs, "les premiers retours régionaux montrent qu'en dehors des grandes agglomérations, souvent, c'est le niveau du département qui revient". Mais "ceci n'est pas défini par les textes", a-t-elle souligné. L'échelon doit être celui de la programmation de l'offre mais aussi celui "du choix des acteurs, compte tenu du contexte spécifique" de chaque territoire.
Six priorités fixées pour les projets de santé mentale
Les priorités identifiées dans le décret sur les PTSM seront "largement reprises" dans les projets régionaux de santé en cours d'élaboration et font l'objet d'un consensus, a poursuivi Katia Julienne. Six priorités ont été validées :
- mettre en place un repérage précoce des troubles psychiques, l'élaboration d'un diagnostic et l'accès aux soins et aux accompagnements nécessaires, "conformément aux données de la science, et aux bonnes pratiques professionnelles" ;
- organiser des parcours de santé et de vie de qualité et sans rupture, notamment pour les personnes souffrant de troubles psychiques graves, en situation ou à risque de handicap psychique, en vue de leur rétablissement et de leur insertion sociale ;
- permettre l'accès des personnes souffrant de troubles psychiques à des soins somatiques adaptés à leurs besoins ;
- prévenir et prendre en charge les situations de crise et d'urgence ;
- promouvoir les droits des personnes souffrant de troubles psychiques, renforcer leur pouvoir de décision et d'action, et la lutte contre leur stigmatisation ;
- agir sur les déterminants sociaux, environnementaux et territoriaux de santé mentale.
Ces priorités sont "bien sûr à adapter aux contextes locaux, qui sont par nature différents", a souligné la DGOS, ajoutant qu'il s'agissait d'un point "très important". C'est pour cela que la loi prévoit que le PTSM est "construit par les acteurs de santé à partir d'un diagnostic territorial [...] partagé, élaboré ensemble". Ce diagnostic est construit dans une logique ascendante, qui doit permettre d'identifier les insuffisances de l'offre de prévention et de services sanitaires, sociaux et médico-sociaux ainsi que les défauts d'accessibilité, de coordination et de continuité de ces services. Il doit également identifier "les points forts et des bonnes pratiques à partager et à diffuser".
Mais si le périmètre territorial est laissé a priori à la concertation des acteurs de terrain, la DGOS a néanmoins rappelé que l'ARS doit animer la démarche d'élaboration du diagnostic du PTSM, qui est lui arrêté par le directeur général (DG) de l'agence. La méthodologie devrait permettre, entre autres, la participation des communautés psychiatriques de territoires lorsqu'elles sont en place. Et s'il n'y a pas d'initiative des acteurs du territoire ou si le projet n'aboutit pas, ce sera le DG de l'ARS qui prendra les dispositions nécessaires pour que le territoire considéré bénéficie bien au final d'un tel projet de santé mentale.
* Cette journée a été organisée notamment par l'Association des établissements du service public de santé mentale (Adesm), la Conférence nationale des présidents de commission médicale d’établissement (CME) des CH spécialisés, la Fehap et la FHF, en lien avec les représentants des patients et des familles.
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