Soucieuses d'aligner les dispositions légales avec la réalité de terrain, quatre associations se sont lancées dans une grande enquête auprès des usagers des MDPH. Au regard de résultats "globalement décevants", les organisations appellent les structures incriminées à corriger rapidement les dysfonctionnements.
Régulièrement alertés sur les largesses que s'octroient les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) par rapport à la loi, Autisme France, Egalited, Toupi et Dys Nos droits ont tenté de faire le clair sur leurs pratiques. Sur la base d'un questionnaire réalisé auprès de quelque 1 869 usagers, les quatre organismes entendent donc répondre pour de bon à la question suivante : "Votre MDPH respecte-t-elle la loi ?"
Délai de traitement, l'éternel problème
En ligne de mire, les délais de traitement des dossiers, les modalités de dialogue mises en place avec l'usager ou son représentant légal ainsi que le respect du libre choix du praticien lors de l'établissement du diagnostic et des évaluations pour le montage du dossier. Si ce dernier élément semble "ne pas être un problème majeur" pour les associations, celles-ci identifient plusieurs "points d'alerte". À commencer par le délai de quatre mois, "jamais" ou "rarement" respecté pour 51% des répondants. Loin d'être une surprise, ce résultat confirme les données déjà remontées à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), qui soulignait dans ses derniers repères statistiques un délai de traitement accru à bientôt cinq mois en moyenne (lire ci-contre).
Souvent synonyme de ruptures de prestations, l'allongement du délai figure au rang des problématiques dans le viseur du Gouvernement. La secrétaire d'État en charge des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion Ségolène Neuville le rappelait en effet en novembre dernier devant le Sénat : elle ne ferme pas la porte à l'instauration d'un dossier unique. En l'attente des arbitrages gouvernementaux — vraisemblablement noués aux conclusions du groupe de travail mené par l'Assemblée des départements de France (ADF), et dont les résultats ne devraient pas tarder à sortir —, les associations tapent du poing sur la table. Arguant des "situations souvent précaires" des usagers, ces dernières le disent tout net, "il n'est pas acceptable qu'elles soient laissées sans solution pendant des durées supérieures à quatre mois". Et d'y aller de ses préconisations : faire évoluer la législation en accord avec le droit commun pour passer d'un rejet tacite à quatre mois à un accord tacite à deux mois et étendre les délais d'attribution des prestations au-delà d'un an. Un chemin en partie engagé par le Gouvernement à la suite de l'annonce, lors de la Conférence nationale du handicap de 2014, d'une extension de l'allocation pour adulte handicapé (AAH) à cinq ans.
Le dialogue avec l'usager souvent rompu
Si la loi de 2005 "a été bien conçue" en ce qu'elle prévoit "un véritable dialogue avec l'usager", les associations pestent cependant au regard de son application sur le terrain. Et pour cause, 70% des répondants indiquent ne pas recevoir le plan personnalisé de compensation dans les quinze jours précédant la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). 45% précisent ne pas avoir pu rencontrer l'équipe pluridisciplinaire d'évaluation et 46% disent ne pas avoir pu assister à la commission, dans les deux cas malgré leur demande. Sans compter les motivations de décisions, réalisées dans 29% des cas. Autant de points qui attisent les craintes.
Le plan d'accompagnement global, adopté avec le loi de Santé en fin d'année dernière et mise en place par 23 maisons départementales dans le cadre du dispositif "Une réponse accompagnée pour tous", caracole en tête. "Comment espérer que l’accord préalable soit effectivement recueilli sur le plan d’accompagnement global alors qu’aujourd’hui même, dans 70% des cas, le projet personnalisé de compensation n’est pas même soumis pour observation à la personne handicapée ou à sa famille quinze jours avant la commission ?", s'interrogent les organisations. Une seule solution donc selon elles : impérativement "rappeler aux MDPH leurs obligations légales et règlementaires en la matière et de s'assurer de leur application", et ce, en priorité auprès des 19 MDPH entrées dans le dispositif et pour lesquelles les pratiques sont jugées peu correctes. Comme pour s'en assurer, les associations n'hésitent pas à lâcher des noms. La Guyane, la Côte d'Or, le Bas-Rhin, les Landes, les Pyrénées-Orientales, la Sarthe, l'Yonne, la Seine-et-Marne, le Morbihan, la Loire-Atlantique, la Saône-et-Loire, la Loire, l'Aude, la Seine-Maritime, la Drôme, les Alpes-de-Haute Provence, la Corrèze, la Vendée et le Pas-de-Calais. Comme une pression supplémentaire.
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