Par Catherine Mallaval — 31 mars 2016
L’Américain Scott Stossel, phobique et anxieux chronique, a mené une enquête édifiante sur ce mal méconnu. Il livre une drôle de somme traduite en français.
Debout les flippés de la Terre, il y a plus anxieux que vous. Et cela devrait être bien plus réconfortant que la flopée de bouquins, plantes et thérapies qui promettent de combattre le mal. Le nom de cet anxieux maximal à côté duquel les rougisseurs et trembloteurs font figure de chochottes zen ? Scott Stossel, bientôt 47 ans, Américain résidant à Washington. Cet homme, amis stressés, ne mégote jamais sur les crises d’inquiétude, avec brûlures d’estomac, maux de tête, vertiges, douleurs dans les bras et les jambes ; il ressent parfois une extrême faiblesse, comme si une grippe ou une mononucléose l’avait frappé, et se débat avec des difficultés vite obsessionnelles à respirer, déglutir ou simplement mettre un pied devant de l’autre. Il faut ajouter à ce tableau clinique des peurs et phobies dont voici la liste non exhaustive : Scott Stossel souffre des espaces clos (claustrophobie), des hauteurs (acrophobie), de la peur de s’évanouir (asthénophobie), du fromage (turophobie), de parler en public (glossophobie), de prendre l’avion (aréodromophobie), de vomir (émétophobie) et fort logiquement de vomir en avion (aéronausiphobie). L’enfer ? Ça y ressemble.
Cela n’a pourtant pas empêché Scott Stossel, «paquet de peurs et de névroses» depuis l’âge de 2 ans, de réussir. Diplômé de Harvard, il occupe le poste de rédacteur en chef du prestigieux magazine américain The Atlantic. L’homme, qui n’en est pas à son premier bouquin, s’est offert un surcroît de notoriété avec un pavé à succès (80 000 exemplaires écoulés) paru en 2014 aux Etats-Unis… sur l’anxiété. Les Français (après une quinzaine de pays) peuvent enfin engloutir ces Tribulations d’un angoissé chronique en quête de paix intérieure (1). Sur plus de 400 pages, l’auteur narre son combat contre son mal et, pour mieux en saisir les rouages, convoque la philosophie, la psychanalyse, la pharmacologie, ainsi que les dernières recherches en neurosciences et génétique. Le boulot d’enquête est impressionnant. La description des troubles de Scott Stossel, vertigineuse, sans manquer d’humour.
On a sottement espéré que l’Américain viendrait faire la promotion de son ouvrage à Paris, avant de mesurer qu’un aérodromophobe limite forcément ses trajets. Une interview par Skype ? On a craint pour la tranquillité de cet homme qui a vécu «quelques humiliantes catastrophes mineures» (flirt au lycée interrompu par peur panique de rendre ses tripes, évanouissement à la naissance de son premier enfant, interruption de conférences malgré l’absorption massive de Xanax et de vodka…). L’option des questions par mail a donc été retenue. Examen de ce «cas» non sans une certaine… appréhension.
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