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jeudi 16 décembre 2021

Le psychiatre et psychanalyste Daniel Widlöcher est mort

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Publié le 15 décembre 2021

Attaché depuis toujours à la cause d’une approche multiple des maladies de l’âme, ce professeur, qui a exercé plus de vingt ans à la Pitié-Salpêtrière à Paris, est mort le 14 décembre, à l’âge de 92 ans.

Le professeur en psychiatrie Daniel Widlocher à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, en 1980.

Né à Paris le 8 juin 1929, Daniel Widlöcher, issu d’une famille catholique d’origine alsacienne, est mort le 14 décembre, à l’âge de 92 ans, à Paris. Il s’oriente très tôt vers la médecine et la psychiatrie. Excellent clinicien, il aura une éblouissante carrière hospitalo-universitaire, notamment comme professeur au CHU de la Pitié-Salpêtrière entre 1972 et 1995. Et, de même, dans le champ de la psychanalyse, comme membre de l’Association psychanalytique de France (APF), puis comme secrétaire et président de l’International Psychoanalytical Association (IPA), en 1973 et entre 2001 et 2005.

Auteur de nombreux ouvrages – Les Logiques de la dépression(Fayard, 1983), Nouvelles cartes de la psychanalyse (éd. Odile Jacob, 1996) –, il était à la fois un freudien orthodoxe, proche d’Anna Freud, un social-démocrate engagé et un remarquable organisateur de la santé mentale, soucieux d’instaurer un dialogue, non seulement avec les représentants des différentes psychothérapies, mais aussi avec les spécialistes des maladies cérébrales.

En 1953, après avoir été l’élève de Jenny Aubry, il entre en analyse chez Jacques Lacan, dont il admire la culture et l’intelligence. Mais supportant mal les extravagances du personnage, il suit ses amis Jean Laplanche et Wladimir Granoff au moment de la scission de 1963, qui aboutit un an plus tard à la création de l’APF.

De par le monde

En juillet 1973, lors du 28e congrès de l’IPA qui se tient à Paris, il découvre les tensions opposant les psychanalystes européens et nord-américains. Magnifique rénovateur de l’école allemande, Alexander Mitscherlich propose sa candidature à la présidence, dont il est écarté : personne à cette époque ne tient à élire un Allemand à la tête de l’empire fondé par Freud, comme s’il fallait faire payer à cet antinazi de la première heure la politique de collaboration menée par l’IPA entre 1935 et 1945. Il faudra attendre l’année 1985 pour qu’un tel congrès se tienne sur le sol allemand.

C’est donc Serge Lebovici qui est élu, devenant ainsi le premier président français de l’IPA. Il nomme aussitôt Widlöcher secrétaire général, lequel s’initie alors à la politique internationale du mouvement, combinant ses fonctions hospitalières parisiennes et son nouveau rôle de dirigeant, qui l’oblige à parcourir le monde.

En juillet 1974, il est saisi d’une redoutable affaire lorsque Leao Cabernite, président de la Société psychanalytique de Rio de Janeiro, est accusé d’avoir protégé, en toute connaissance de cause, un tortionnaire qu’il avait en formation. L’affaire aura un retentissement mondial. En 2010, Widlöcher reconnaîtra le manque de vigilance de la direction de l’IPA : « Je dois le dire, malgré mes efforts, nous n’avons jamais pu, Serge et moi, nous laver de l’accusation d’avoir manqué de rectitude dans cette affaire. »(Comment on devient psychanalyste et comment on le reste, éd.Odile Jacob, 2010).

Très éclectique

Missionné pour de multiples rencontres scientifiques concernant la genèse de la dépression, Widlöcher est mandaté par François Mitterrand, au printemps 1986, pour étudier, en coopération avec l’Allemagne, l’avancée des travaux consacrés à l’exploration du cerveau. A son retour, le président l’interroge : « J’ai pu lui expliquer que c’était la détection et la reconnaissance des troubles qui avaient progressé en qualité, mais que rien ne laissait penser à une augmentation des cas de dépression. » (Ibid, p. 186).

En septembre 2001, Widlöcher fera voter par le conseil exécutif de l’IPA une déclaration de non-discrimination envers les psychanalystes homosexuels. Par ce geste tardif, il reconnaît la validité d’un combat mené depuis un quart de siècle par les praticiens américains. Il était temps !

Malgré sa rupture avec Lacan, Widlöcher, toujours très éclectique, ne cessera jamais d’entretenir des liens avec les différents groupes lacaniens, non pas pour les annexer à l’IPA, mais plutôt parce qu’il avait pris conscience, en parcourant le monde, de la nécessité d’une union de toutes les obédiences psychanalytiques face aux attaques des antifreudiens radicaux. Tolérant, courtois et prudent en toutes circonstances : tel était le credo de ce clinicien, attaché depuis toujours à la cause d’une approche multiple des maladies de l’âme.

Daniel Widlöcher en quelques dates

8 juin 1929 Naissance à Paris

1972-1995 Professeur en psychiatrie au CHU de la Pitié-Salpêtrière à Paris

2001-2005 Président de l’Association pyschanalytique internationale

2010 Publie « Comment on devient psychanalyste et comment on le reste »

14 décembre 2021 Mort à Paris


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