Le Monde avec AFP Publié le 27 octobre 2021
Le ministre de la santé est revenu sur ces fermetures dans un entretien à « Libération », promettant une enquête pour savoir pourquoi les nouveaux recrutements n’ont pas suffi à compenser.
Malgré la pandémie, plus de 5 700 lits d’hospitalisation complète ont été fermés en 2020 dans les établissements de santé français, rapportait une étude du ministère de la santé fin septembre. Dans un entretien publié dans Libération mercredi 27 octobre, le ministre de la santé, Olivier Véran, esquisse les raisons de ces fermetures massives : « Faute de soignants, faute surtout de pouvoir en recruter. »
Outre le manque de personnel, le ministre de la santé note une augmentation de l’absentéisme « d’un peu moins d’un point sur la même période pour les personnels non médicaux », ainsi que des démissions, mais « dans des proportions modérées ». Résultat : « Dans seize CHU (…) une hausse de près d’un tiers des postes vacants chez les paramédicaux par rapport à l’automne 2019. »
Les nouveaux recrutements ne suffisent pas à compenser les besoins. Entre 2018 et 2021, un peu plus d’un millier d’étudiants infirmiers en formation ont « démissionné avant la fin de leurs études ». « Une enquête sera lancée » pour qu’on « en comprenne les raisons ».
La Fédération hospitalière de France (FHF) avait fait état, le 20 octobre, d’« un taux d’absentéisme de l’ordre de 10 % » et de « 2 à 5 % de postes vacants de soignants » au sein des hôpitaux et des établissements médico-sociaux publics.
Et dans son avis du 5 octobre, le conseil scientifique faisait état d’« un pourcentage important de lits fermés, chiffré à environ 20 % »malgré un « recours déjà important et en augmentation aux heures supplémentaires et à l’intérim ». Ces données recueillies « auprès des grandes structures hospitalières du pays dans les plus grandes régions françaises » mettent également en lumière « un grand nombre d’emplois vacants, avec notamment cinq professions en tension » : infirmiers, infirmiers de bloc opératoire, infirmiers anesthésistes, manipulateurs de radiologie et masseurs-kinésithérapeutes.
çà« Le chiffre de 20 %, j’aurais tendance, comme ça, à le contester. Et en tous les cas parce que j’aime profondément la science et qu’avant de m’exprimer, je vérifie de ne pas raconter n’importe quoi. J’ai demandé à avoir une étude la plus exhaustive possible sur l’état de fermeture », a commenté mercredi après-midi M. Véran lors d’une audition à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2022. « Pour l’instant, le seul chiffre dont je dispose, c’est sur un échantillon très parcellaire de seize CHU. Avec tous les biais qu’on peut reconnaître, sur seize CHU, la dernière donnée qui m’est remontée, c’est 5 % de lits de médecine temporairement fermés. On serait donc assez loin de 20 % du parc hospitalier général », a-t-il ajouté.
« La situation est compliquée, mais je refuse le fatalisme », ajoute Olivier Véran auprès de Libération. Il assure avoir conscience « que la problématique actuelle la plus lourde », ce sont « les conditions de travail dégradées à cause des sous-effectifs ».
Multiples alertes
Les alarmes sur la dureté des conditions de travail dans les hôpitaux se sont faites nombreuses depuis plusieurs années.
Dès mai 2019, certains établissements hospitaliers, notamment leurs services d’urgences, se mettaient en grève. En août de cette année-là, plus d’un tiers des 640 établissements du pays étaient touchés par la mobilisation. « Nos revendications pour plus d’humanité dans la chaîne de soins sont les mêmes », expliquait alors au Monde un assistant de régulation du SAMU de Savoie, en grève pour soutenir ses collègues de l’hôpital de Chambéry. « Ce qu’on veut, ce n’est pas une prime, c’est des collègues. »
En janvier 2020, près de 1 200 médecins hospitaliers, dont 600 chefs de service et 470 responsables d’unités, avaient annoncé leur démission de leurs fonctions d’administration, de gestion et de représentation, en l’absence de négociation avec le gouvernement sur les moyens de l’hôpital public.
Le Ségur de la santé, conclu en juillet 2020, destiné à réformer ce secteur et à le rendre plus attractif, notamment via des augmentations de salaires, n’a pas réglé le malaise des personnels hospitaliers. « Avant le Ségur, les infirmiers se situaient à – 20 % par rapport au salaire moyen européen, expliquait alors au MondeThierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers CFE-CGC. Depuis la revalorisation, on est encore à – 10 %. »
Depuis le 9 octobre, le personnel des urgences du centre hospitalier de Laval (Mayenne) est en grève illimitée. « On est cinq équivalents temps plein pour un objectif entre seize et dix-huit. A peine un tiers de l’objectif cible », avait déclaré Caroline Brémaud, chef du service des urgences de cet hôpital, invitée sur France Inter le 18 octobre.
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