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Après six semaines de négociations avec le gouvernement, un projet d’accord sur la revalorisation des salaires des agents hospitaliers hors médecins a été présenté jeudi. En deçà des attentes syndicales, qui pointent néanmoins plusieurs acquis.
Epilogue en demi-teinte pour les concertations salariales du Ségur de la santé, volet clé de cette large concertation enclenchée le 25 mai pour «refonder l’hôpital public». Dans la nuit de mercredi à jeudi, à l’issue de quatorze heures de négociations serrées, les syndicats CGT, FO, Unsa et CFDT ont quitté le ministère de la Santé avec un projet d’accord sur les rémunérations des agents hospitaliers et des Ehpad du secteur public - hors médecins. «Morts de fatigue», «déçus», mais avec le sentiment d’avoir été « au bout» de ce qu’ils pouvaient obtenir. Leur espoir de satisfaire la revendication phare des hospitaliers, soit une hausse de 300 euros net par mois des salaires, a vécu. C’est une revalorisation de 180 euros net par mois en deux temps (90 euros en septembre, le solde en mars) que les représentants syndicaux vont soumettre à leurs instances respectives d’ici à lundi.
Ce n’était pas gagné. Portés par la colère de leurs troupes et le soutien de l’opinion, les syndicats étaient remontés à bloc, tant il y avait loin entre le coup de pouce salarial de 165 euros que le gouvernement se disait prêt à consentir et les revendications du terrain. Le nouveau locataire de Matignon l’a vite compris : impossible de sortir de l’impasse sans une rallonge budgétaire, et une bonne mise en scène.
Rembobinons : mardi soir, accompagnés du Premier ministre, Jean Castex, le ministre de la Santé, Olivier Véran, et la «madame Loyal» du Ségur, Nicole Notat, retrouvent les quatre représentants syndicaux. Pour ces derniers, la présence du Premier ministre, ex-haut fonctionnaire du ministère de la Santé et à ce titre très au fait des problématiques de l’hôpital, est un «geste symbolique fort». L’assurance aussi que l’exécutif est prêt à des concessions.
Pactole
Conformément à leurs attentes, Castex délie les cordons de sa bourse : en quelques secondes, l’enveloppe destinée à améliorer le sort des agents hospitaliers non médicaux passe de 6,4 à 7,5 milliards d’euros. Un pactole très conséquent, difficile à refuser. Mais leur soulagement est de courte durée. Sitôt annoncé, le Premier ministre assortit son geste d’exigences qui en annulent presque l’effet : à l’entendre, la rallonge doit aussi financer 7 500 créations de postes au sein des établissements de santé, et aider à pourvoir 7 500 autres postes de paramédicaux (déjà budgétés mais vacants faute de candidats) de sorte à soulager les soignants épuisés par la lutte contre le Covid. En sus, l’enveloppe doit aussi permettre d’abonder un système d’intéressement collectif, rebaptisé «engagement collectif», et de réviser les grilles indiciaires.
Calculette en main, les syndicats comprennent que l’exécutif n’entend lâcher que 5,3 milliards pour augmenter les salaires. «Avec ça, on ne peut pas espérer une augmentation de plus de 165 euros par mois, très loin des 300 euros réclamés depuis bien avant l’épidémie et qui correspond seulement au rattrapage de l’inflation sur treize ans», s’emporte Didier Birig, secrétaire fédéral du syndicat FO Santé.
Unis, les syndicats fixent la «ligne rouge» à 200 euros net. Jusqu’à minuit, ils tentent d’arracher à Véran des marges de manœuvre. En vain. Prenant acte du blocage, le ministre renvoie au lendemain la «réunion conclusive» du pan rémunérations du Ségur. Les négociations vont cette fois durer quatorze heures. Quand les deux parties se séparent, jeudi à 2 heures du matin, l’enveloppe concédée par l’exécutif n’a pas bougé. Mais sa copie a été revue et corrigée. Didier Birig : «On a obtenu des modifications significatives dans la répartition des 7,5 milliards.»
«Ce n’est pas rien»
Les sommes allouées à l’intéressement collectif sont révisées à la baisse et le geste souhaité par le gouvernement en faveur des paramédicaux du privé et du privé non lucratif, contenu dans une enveloppe de 1,6 milliard (soit une hausse de 160 à 170 euros net mensuels). De quoi libérer assez de marge pour porter à 180 euros net mensuels le coup de pouce salarial au personnel non médical des hôpitaux et des Ehpad du secteur public. «Plus d’un million d’agents vont profiter d’une révision indiciaire ou indemnitaire, ce n’est pas rien, poursuit le syndicaliste de FO. Et il y a dans le protocole des avancées importantes, notamment sur l’accélération des carrières dans les filières de soins médicaux techniques et de rééducation. Dans une négociation, on est obligé de faire des concessions.»
La CFDT parle de «bon accord». Côté CGT, le ton est plus mitigé : «On n’a même pas obtenu 200 euros de hausse de salaire, regrette Mireille Stivala, secrétaire générale de la CGT Santé. On a aussi des inquiétudes sur leur volonté de mettre en place des accords locaux par établissements sur le temps de travail.» L’atmosphère générale est toutefois à l’apaisement. Conscients de la dégradation de l’environnement économique et social, les représentants syndicaux se gardent d’attiser les braises de la colère.
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