Près de 22 % des femmes sans domicile en famille hébergées en Île-de-France et disposant de la CMU ou de l’AME rapportaient avoir subi un refus de soins à cause de ces couvertures sociales. C’est ce que révèle une étude publiée ce jour par Santé publique France dans son Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH). Une pratique délétère et contraire à la loi, qui constitue une barrière à l’accès aux soins de ce public vulnérable dont l’état de santé requiert une prise en charge médicale.
Des facteurs associés
L’objectif de l’étude était d’estimer la prévalence des refus de soins à cause de la CMU ou de l’AME rapportés par les femmes sans domicile, en famille, et hébergées en Île-de-France, et d’en identifier les facteurs associés. L’étude montre que la proportion de refus de soins liés à la CMU ou l’AME variait selon les caractéristiques de la femme. « Le refus de soins était plus fréquent chez les femmes étrangères, chez celles qui avaient déjà eu le sentiment d’avoir été moins bien reçues par du personnel médical que les autres patients et chez les femmes qui se déclaraient en mauvaise santé », peut-on lire dans le rapport.
La population étudiée incluait des femmes ayant participé à l’enquête ENFAMS réalisée en 2013 par l’Observatoire du Samu social de Paris, et bénéficiaires de la CMU ou de l’AME. Dans cette enquête, 561 femmes était bénéficiaires de l’une ou l’autre des couvertures sociales. L’information sur le refus de soins a été collectée par la question suivante dans le questionnaire de l’enquête ENFAMS : « Est-il arrivé qu’on vous refuse une consultation médicale parce que vous êtes à la CMU ou à l’AME ? »
Une cause de renoncement aux soins
Le questionnaire a été administré en 17 langues permettant ainsi d’inclure les personnes non francophones. En revanche, les auteurs le soulignent clairement : l’étude comporte des limites, notamment l’absence de données sur « la fréquence des refus de soins et leurs circonstances détaillées » : spécialités médicales, secteurs conventionnés, etc. Les résultats sont par ailleurs probablement sous-estimés, rappellent les chercheurs. Et pour cause, « la perception du refus de soins peut être différente d’une femme à une autre ».
En population générale, en 2003, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) publiait une étude et faisait état de 15 % de refus de soins parmi les bénéficiaires de la CMU. En 2008, une nouvelle étude de la Drees indiquait que plus d’un bénéficiaire de l’AME sur trois avait expérimenté un refus de la part d’un professionnel de santé.
Les conséquences ne sont pourtant pas à négliger : « Essuyer un refus de soins peut être une cause de renoncement aux soins suite à ces refus et engendrer par la suite une détérioration de l’état de santé », rappellent les auteurs. En vue de prévenir ces refus de soins, le Défenseur des droits a créé, en 2018 et en collaboration avec différents acteurs dont trois ordres de professionnels de la santé, deux outils informatifs à destination des professionnels de santé et des bénéficiaires de couvertures sociales.
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