Dans une lettre à Agnès Buzyn, la présidente de l'Union nationale des familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques déplore le report de l'inscription de la psychiatrie parmi les domaines retenus pour les pratiques infirmières avancées. Elle demande aussi une reconnaissance de la schizophrénie comme pathologie chronique.
La présidente de l'Union nationale des familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam), Béatrice Borrel, adresse ce 16 mai une lettre ouverte à la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn. Elle y déplore la mise à l'écart de la psychiatrie dans des chantiers de réforme en cours. En effet, "deux sujets d'actualité [...] font craindre [à l'Unafam] que la psychiatrie reste une discipline à part durant encore quelques décennies", faisant allusion à une déclaration récente d'Agnès Buzyn qui a fait réagir les acteurs concernés. La ministre a en effet déclaré le 26 avril dernier sur France Culture que la psychiatrie s'est "écartée progressivement de la médecine". "On voit bien que les établissements de santé mentale aujourd'hui ne souhaitent pas s'inclure par exemple dans les groupements hospitaliers de territoire, qu'il y a une difficulté à intégrer la psychiatrie dans la prise en charge globale", a-t-elle poursuivi.
Reconnaître la schizophrénie comme pathologie chronique
En premier lieu, la présidente de l'Unafam évoque la grande consultation autour de la stratégie de transformation du système de santé. L'un des chantiers — dont les travaux doivent être être présentés fin mai (lire notre article) — porte sur la qualité et la pertinence des soins. "Pour ce faire, une élaboration des indicateurs de qualité des parcours pour les dix pathologies les plus fréquentes est en cours d'élaboration avec la Haute Autorité de santé (HAS), dès cette année", relève Béatrice Borrel. "Or, parmi les six pathologies chroniques déjà identifiées, ne figure aucune pathologie psychiatrique, s'inquiète-t-elle. Par ailleurs, nos échanges avec la HAS ne semblent pas aller dans le sens d'en retenir une et nous laissent craindre que de nombreux blocages repoussent ce chantier". Les raisons de ces blocages, comme la complexité du sujet, ne sont plus aujourd'hui acceptables pour les patients et leur entourage, souligne la présidente de l'Unafam.
Elle demande donc que "la schizophrénie fasse partie des pathologies retenues". La mesure de la qualité des parcours est "d'autant plus importante que cette pathologie affecte de nombreux malades durablement (une personne sur 100 en France selon l'Organisation mondiale de la santé), que la qualité des soins dépend non seulement de l'offre sanitaire locale mais aussi des pratiques du psychiatre et que le lien sanitaire, social et médico-social est souvent défaillant", insiste-t-elle.
Inscrire la psychiatrie dans les pratiques avancées
En second lieu, l'Unafam évoque le futur décret relatif aux domaines d'intervention, aux conditions et aux règles s'appliquant à l'infirmier exerçant en pratique avancée. "Si certaines pathologies chroniques sont retenues, l'inscription pour la psychiatrie est reportée", relève Béatrice Borrel. La DGOS a en effet annoncé que le texte qui sera publié ne comprendra pas la mention sur la psychiatrie et santé mentale. Faute aujourd'hui d'"un degré de consensus entre les différents acteurs pour mettre en place la pratique avancée infirmière en psychiatrie" mais avec l'objectif d'une mise en place en septembre 2019 (lire notre interview).
"Comment justifier cette décision alors que la diminution du nombre de psychiatres est programmée ?", s'interroge Béatrice Borrel. Elle souligne que "l'intérêt d'une formation complémentaire d'un niveau master pour suppléer les psychiatres et les médecins généralistes dans la prise en charge de patients vivant avec des troubles psychiques est un argument pour cette spécialisation" et que ces pratiques "ont déjà fait leurs preuves dans de nombreux pays".
L'inscription de la psychiatrie dans ce nouveau dispositif se justifie pleinement pour plusieurs raisons, développe l'Unafam. Avec d'abord l'importance d'aller au-devant de patients chroniques dont, en particulier, ceux ayant une faible observance thérapeutique mais aussi "la nécessaire prévention afin de limiter les rechutes avec leurs conséquences de réhospitalisations coûteuses pour le patient et le système de santé". Enfin, en raison de la nécessaire mise en œuvre d'une "éducation thérapeutique précoce associant le patient vivant avec des troubles psychiques sévères à ses soins" et d'une action coordonnée des acteurs de la prévention, du sanitaire, du médico-social et du social. Et l'Unafam de rappeler son soutien au développement des soins primaires, à l'accessibilité à des parcours de santé "pertinents et de qualité" et à la réduction des recours inappropriés aux urgences et à l'hospitalisation.
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