Solveig Godeluck / Journaliste | Le 04/03
Les tarifs 2016 des établissements de santé tardent à être arbitrés dans un contexte budgétaire tendu.
Comme l'année dernière, les délais n'ont pas été tenus. Les établissements de santé publics et privés attendaient la publication de leurs tarifs 2016 au 1er mars, mais le ministère de la Santé et Bercy continuent à discuter. L'un des sujets les plus épineux est la « liste en sus » sur laquelle sont inscrits les médicaments innovants et coûteux que l'hôpital est autorisé à prescrire hors budget. Faut-il biffer automatiquement les molécules les moins efficaces, au risque de laisser des patients sans remède ? Ou bien juger au cas par cas, comme le souhaite la ministre de la Santé, Marisol Touraine ? D'un autre côté, le contexte budgétaire n'a jamais été aussi tendu pour les hôpitaux et les cliniques. Avec un objectif de progression de leurs dépenses limité à 1,75 % cette année, soit une enveloppe de 78 milliards d'euros, il n'y a quasiment pas de marge de manoeuvre.
Certes, le budget total des établissements continuera à augmenter. Mais la progression « naturelle » de leurs coûts est estimée entre 3 et 3,5 % par an. La facture s'alourdit toute seule, même sans embauches et sans investissements, du fait de l'avancement des carrières (« glissement vieillesse technicité » en jargon technocratique), de l'inflation, du progrès technique et du développement des pathologies chroniques.
Les hospitaliers ne se font donc guère d'illusions sur les sacrifices à venir, après une baisse des tarifs de 1 % dans le public et de 2,5 % dans le privé en 2015. « On n'a jamais connu un tel niveau de rigueur », constate Cédric Arcos, le directeur général adjoint de la Fédération hospitalière de France. La FHF, qui représente les hôpitaux publics, voudrait toutefois sauvegarder deux enveloppes dans son périmètre.
Confiscation budgétaire
Elle milite pour une augmentation de la dotation des établissements d'hospitalisation de longue durée, de soins de suite et de rééducation, et de psychiatrie. Contrairement aux autres hôpitaux, ils ne facturent pas à l'activité. Ils tournent uniquement avec des crédits votés chaque année. Or ces crédits sont devenus au fil du temps la variable d'ajustement financière du système de santé : quand l'administration estime que les objectifs budgétaires risquent de ne pas être tenus, ils sont confisqués.
« Alors que les besoins de ces établissements croissent mécaniquement, les gels de crédit annulent quasiment l'augmentation annuelle des dotations », explique Cédric Arcos. Pour remédier à cette paupérisation du secteur, le directeur général adjoint de la FHF réclame plus de dotations et, surtout, moins de gels : « On a eu 220 millions d'euros d'annulations l'an dernier, pour 2016 il ne faudrait pas dépasser 80 millions euros. »
Deuxième revendication de la Fédération, une augmentation de 1 % des « missions de service public ». Cette enveloppe de 6,3 milliards d'euros en 2015 alimente quasi exclusivement les hôpitaux, ce qui hérisse les cliniques. Mais à la FHF, on joue sur du velours : « On ne peut pas réaffirmer l'importance du service public hospitalier à travers la loi santé et mettre ce dernier à la diète ! » glisse Cédric Arcos. Craignant d'être discriminés, les établissements privés avaient fait des pieds et des mains pour retirer cette disposition de la loi. En vain.
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