Des équipes de recherche annoncent régulièrement avoir identifié un ou plusieurs gènes associés à la schizophrénie, mais parvenir à établir un réel lien de cause à effet est une autre paire de manches.
C’est pourtant ce que vient de réaliser l’équipe de Michael O’Donovan, de l’université de Cardiff, dans un article publié dans la revue « Neuron ».
Plusieurs mutations rares sont statistiquement liées au développement de la schizophrénie et notamment des mutations de type CNV. Les CNV sont des mutations qui consistent en une augmentation du nombre de copies d’un ou plusieurs gènes.
En 2014, 108 locus affectés par ces mutations avaient été identifiés par l’équipe de O’Donovan, au cours d’une analyse de très grande ampleur qui avait alors mis en évidence la piste immunitaire et la piste glutamatergique comme étant des explications possible de la pathologie.
Une analyse de plus de 16 000 patients
En 2012 et 2014, ces mêmes chercheurs ont pointé du doigt le rôle que pouvaient jouer les récepteurs NMDA au glutamate, impliqués dans la voie de signalisation Gabaergique, ou pour des protéines ARC régulant le cytosquelette des neurones.
Il fallait néanmoins savoir si des mutations touchaient les gènes codant pour ces deux protéines étaient présentes chez un grand nombre de malades. C’est désormais chose faite grâce à cette nouvelle série de travaux publiés dans « Neuron ».
Les auteurs ont ratissé le plus large possible, et ont analysé le génome de 11 355 patients avec de 16 416 contrôles non atteints, séquencé dans le cadre de trois larges études internationales. Ils ont recherché, au sein des CNV associés à la maladie, la présence de 134 gènes connus pour être impliqués dans divers aspects du fonctionnement du système nerveux. Parmi ces nombreux candidats, les mutations des récepteurs NMDA au glutamate étaient le plus souvent associées au diagnostic de la schizophrénie. Ce n’était pas le cas des protéines ARC, mais une nouvelle analyse a montré qu’on retrouvait fréquemment des délétions dans les gènes codant pour les protéines ARC.
Une famille de cibles thérapeutiques
« Le lien entre les dysfonctionnements du système glutamatergique et la pathophysiologie de la schizophrénie ne fait plus aucun doute », estiment les auteurs dans leur discussion. Ils soulignent : « les modèles théoriques qui font reposer l’explication de la schizophrénie sur les dysfonctionnements des récepteurs NMDA sont maintenant assez anciens, mais les nouvelles données génétiques suggèrent désormais que la contribution glutamatergique à la schizophrène embrasse une large variété de processus cellulaires qui convergent pour affecter la transmission synaptique des neurones gabaergiques et leur plasticité. »
En plus de prouver définitivement une cause génétique de la schizophrénie, les travaux de l’équipe de Michael O’Donovan permettent de dessiner les contours des mécanismes de la pathologie, identifiant du même coup toute une famille de cibles thérapeutiques.
Damien Coulomb
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