LE MONDE | | Par Julia Pascual
Fédérer des réseaux d’hommes au sein de l’entreprise pour une meilleure égalité professionnelle ? La démarche peut paraître contre-intuitive. Elle est en tout cas inédite et portée depuis trois ans par l’association Happy Men. Son fondateur, le chef d’entreprise Antoine de Gabrielli, organisait jeudi 4 juin un forum au siège du ministère des droits des femmes. 250 cadres – en écrasante majorité des hommes – de grands groupes du secteur bancaire, des transports, de l’énergie ou encore de la téléphonie étaient conviés à découvrir les vertus de l’égalité hommes-femmes en matière d’épanouissement personnel et de performance managériale. Ou comment prouver à la gent masculine que plus d’équité ne les lèsera pas.
« A ceux qui disent qu’ils sont de la génération sacrifiée, il faut leur montrer que c’est du gagnant-gagnant », défend Benoit Legrand, jeune PDG d’ING Bank France. Son collègue Jérôme Tolot, DG adjoint d’Engie (ex-GDF Suez), est plus difficile à séduire : « Ça pose problème de dire aux hommes qu’ils auront moins de chances de commander parce qu’il y a une politique d’égalité. On peut leur dire qu’ils passeront plus de temps à la maison, mais certains s’en fichent. »
« Pas d’effet levier »
On n’appâte pas les détenteurs du pouvoir avec « des discours bienveillants ou culpabilisants », insiste M. de Gabrielli. Pas plus qu’avec des lois, croit-il : « Les quotas de femmes dans les conseils d’administration n’ont pas d’effet levier ». De Gabrielli s’est donc taillé un prêche qu’il veut imparable : « Il y a une corrélation entre féminisation des instances dirigeantes et performance. Parce qu’un management qui favorise tous les talents est un indicateur d’efficacité. » S’il pousse la démonstration plus loin, il jure que des hommes plus enclins à partager le pouvoir sont des hommes plus épanouis en dehors du bureau et donc moins exposés aux addictions, aux suicides et autres accidents de la route !
M. de Gabrielli, qui est aussi membre de la commission égalité professionnelle du Medef, a déjà convaincu sept grandes entreprises françaises de financer la formation de « référents » Happy Men, pour que sa logique se diffuse. « Notre réseau compte plus de 250 Happy Men », s’enthousiasme t-il. Des cadres hommes qui se réunissent une fois par mois au sein de « cercles » et parlent « télétravail » ou « présentéisme ».
« Pour que la culture d’entreprise bascule, avancer les horaires de réunion, mettre en place des jurys mixtes pour recruter… il faut cibler les managers intermédiaires. On les forme pour qu’ils puissent argumenter ». Les hommes ont semblent-ils tout à y gagner. « D’un point de vue narcissique, c’est aussi très gratifiant. Mes collègues femmes me disent que je suis un mec bien », reconnaît l’un d’entre eux, cadre à la BNP.
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