De plus en plus, les neurosciences mettent l’accent sur la compréhension des dysfonctionnements des réseaux neuronaux dans les troubles psychiatriques. Ces recherches s’appuient largement sur les progrès remarquables de l’imagerie médicale, surtout l’imagerie du tenseur de diffusion et son application à la tractographie[1] qui constitue à ce jour « la seule technique permettant d’observer la connectivité cérébrale in vivo de façon non invasive. »
Procurant des informations sur la matière blanche (dont le rôle fut longtemps éclipsé par celui de la matière grise), l’imagerie du tenseur de diffusion renseigne ainsi sur l’état physique des connexions représentant en somme le «câblage » intracérébral. Réalisée à Créteil (94) et à Paris, en collaboration avec des équipes de Pittsburgh (Pennsylvanie, États-Unis) et de Mannheim (Allemagne), une étude française apporte une « importante contribution à la littérature médicale » sur ce thème, en évaluant notamment « la localisation des principaux déficits en matière blanche et leur variabilité en fonction des sous-types de troubles bipolaires. »
Cette recherche porte sur 118 patients avec un trouble bipolaire de type I (au sens du DSM-IV) et sur 86 sujets-contrôles. Les informations disponibles proviennent en particulier de l’anisotropie de diffusion dans la substance blanche, liée elle-même aux particularités de la microstructure des fibres nerveuses (privilégiant la diffusion des molécules d’eau dans le sens des fibres, et la limitant dans la direction perpendiculaire aux fibres). D’autant plus élevée que la diffusion se révèle anisotrope, la fraction d’anisotropie donne une évaluation objective de ce phénomène.
Comparativement aux sujets-témoins, les patients avec un trouble bipolaire de type I ont des « réductions significatives des fractions d’anisotropie moyennes ». Ces diminutions affectent surtout le tronc (ou corps) et le splenium (ou bourrelet) du corps calleux[2], le cingulum gauche[3], et la partie antérieure gauche du faisceau arqué (arcuate fasciculus[4], un réseau de fibres associatives opérant la jonction entre lobe temporal, lobe pariétal et lobe frontal, et reliant ainsi les aires de Broca et de Wernicke). Au niveau du corps calleux, constatent les auteurs, les patients avec des antécédents de caractéristiques psychotiques ont une fraction d’anisotropie moyenne inférieure à celle des sujets n’ayant pas ces antécédents.
Pour les auteurs, ces résultats mettent en évidence l’existence d’un « dysfonctionnement dans la connectivité au niveau anatomique » et soulignent aussi « le rôle des altérations de cette connectivité dans les caractéristiques physiopathologiques » de ces troubles psychiatriques (psychose et troubles bipolaires). En d’autres termes, la tractographie tend à confirmer en psychiatrie la classique image populaire du « pétage de câble », au sens propre…
[1] http://thesesups.ups-tlse.fr/271/
[2]http://fr.wikipedia.org/wiki/Corps_calleux#mediaviewer/Fichier:Corpus_callosum.gif
[3] http://fr.wikipedia.org/wiki/Gyrus_cingulaire
[4] http://en.wikipedia.org/wiki/Arcuate_fasciculus
[2]http://fr.wikipedia.org/wiki/Corps_calleux#mediaviewer/Fichier:Corpus_callosum.gif
[3] http://fr.wikipedia.org/wiki/Gyrus_cingulaire
[4] http://en.wikipedia.org/wiki/Arcuate_fasciculus
Dr Alain Cohen
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