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jeudi 15 décembre 2022

New York va hospitaliser de gré ou de force les malades mentaux


 



Par    Publié le 14 décembre 2022

Depuis le début de l’année, le métro a déjà été le théâtre de neuf homicides, le plus souvent commis par des déséquilibrés. Accusé de laxisme, le maire démocrate, Eric Adams, a décidé d’employer les grands moyens.

Un travailleur social et un policier viennent en aide à des sans-abri, dans une station de métro de la banlieue de New York, en novembre 2022.

Martial Simon, 61 ans, était connu dans le monde des sans-abri, ceux qui font la queue pour la soupe populaire des Saints-Apôtres, à Manhattan. Souvent incohérent, presque toujours en colère, raconte le New York Times. Surtout contre les médecins et les hôpitaux psychiatriques, où cet ancien gardien de parking originaire d’Haïti avait fait une vingtaine de séjours sans ressortir vraiment soigné. Et puis, ce samedi 15 janvier 2022, dans la station de métro de Times Square, au cœur de Manhattan, dans un accès de rage, à 9 h 37, il a poussé une femme sur les rails alors qu’arrivait un métro. Michelle Alyssa Go, 40 ans, est morte sur le coup. Elle vivait dans l’Upper East Side et travaillait pour l’entreprise de conseil Deloitte. Diagnostiqué schizophrène, Martial Simon devrait être interné jusqu’à la fin de ses jours.

Le drame a particulièrement ému les New-Yorkais, alors que de plus en plus de personnes en détresse psychiatrique sont présentes dans les rues de la ville depuis le Covid-19. Parfois menaçantes, elles errent dans le métro et à ses abords. « En près de vingt ans comme intervenant médical, je n’ai jamais été témoin d’une crise de santé mentale comme celle que connaît actuellement New York », a déploré l’urgentiste Anthony Almojera dans un texte au New York Times.

Selon un décompte réalisé en janvier, près de 3 400 personnes dormaient dans les rues ou le métro. En théorie, et à la différence des villes de la Côte ouest, New York a une obligation de fournir un hébergement d’urgence aux sans-abri.

Depuis le début de l’année, le métro a été le théâtre de neuf homicides, contre deux par an avant le Covid-19, le plus souvent commis par des déséquilibrés. Ils ne représentent qu’une portion infime des homicides new-yorkais, mais expliquent en partie la réticence de la population à reprendre les transports en commun, et donnent à la ville une image de sécurité calamiteuse. « Lorsque vous faites une analyse des crimes dans le métro, vous constatez qu’ils sont le fait de personnes ayant des problèmes de santé mentale », estimait en octobre le maire démocrate de New York, Eric Adams, ancien policier de Brooklyn.

Début novembre, M. Adams a décidé d’hospitaliser de gré ou de force les malades mentaux de sa ville, même lorsqu’ils ne présentent pas de menace à l’ordre public ou aux personnes. « L’homme debout toute la journée dans la rue en face de l’immeuble dont il a été expulsé il y a vingt-cinq ans, qui attend qu’on le laisse entrer ; le boxeur au coin de la rue à Midtown, qui marmonne en donnant des coups à un adversaire invisible ; l’homme inconscient, incapable de descendre du train au bout de la ligne sans l’aide de notre équipe de crise ; ces personnes, comme des centaines d’autres, ont un besoin urgent de traitement et le refusent lorsqu’il leur est proposé, a déclaré M. Adams, le 29 novembre, dans un discours solennel à la mairie. Il existe un malentendu courant et persistant selon lequel nous ne pouvons pas fournir d’assistance involontaire à moins que la personne ne soit violente. A l’avenir, nous ferons tout notre possible pour aider ceux qui souffrent d’une maladie mentale. »

« Le métro n’est pas un endroit pour les personnes qui ont besoin d’une assistance médicale et psychiatrique. » Eric Adams, maire de New York

L’affaire intervient alors que les démocrates, accusés de laxisme en matière d’ordre public, ont subi un sérieux coup de semonce lors des élections de mi-mandat dans l’Etat de New York, perdant quatre sièges de représentants. Elle suscite une polémique sur le respect des libertés des sans-abri, et sur la capacité de New York à prendre en charge les malades. Sur le volet juridique, la mairie compte recourir au concept de « mise en danger de soi-même » pour utiliser des moyens de coercition, à la faveur d’un renforcement de la loi de l’Etat de New York voté en début d’année. « Le métro n’est pas un endroit pour les personnes qui ont besoin d’une assistance médicale et psychiatrique », a asséné M. Adams.

L’urgentiste Anthony Almojera, lui, rétorque : « Je ne suis pas opposé à emmener des malades mentaux en détresse à l’hôpital – nos ambulances le font tout le temps. Mais je sais qu’il est peu probable que cela résolve leurs problèmes. Les hôpitaux sont débordés, alors ils essaient parfois de les déplacer vers d’autres établissements. La gouverneure [démocrate de l’Etat de New York] Kathy Hochul a promis cinquante lits supplémentaires pour les patients psychiatriques de la ville. Nous avons besoin de bien plus pour gérer ceux qui seraient admissibles à une hospitalisation involontaire selon les critères vagues de M. Adams. »


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