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mercredi 24 mars 2021

A Hongkong, le confinement qui arrache les enfants à leurs parents




par Anne-Sophie Labadie, correspondante à Hongkong  publié le 23 mars 202


La péninsule emploie les grands moyens pour éradiquer le Covid-19 et isole d’office en quarantaine tout suspect d’infection. Jusqu’à séparer les enfants de leurs parents. Notre correspondante et ses enfants ont été les victimes de ces mesures draconiennes.

«Je suis choquée de l’emprisonnement d’enfant», s’indigne cette femme qui préfère garder l’anonymat. Parce qu’un cas de Covid-19 a été diagnostiqué dans l’école de son fils de 4 ans, «on a été enlevés de chez nous et placés dans un environnement sommaire de 15 m² avec l’impossibilité de sortir même cinq minutes», s’emporte-t-elle. Dans son malheur, la jeune mère est toutefois autorisée à rester avec sa progéniture, une chance que d’autres parents ne peuvent goûter.

Hongkong en effet ne lésine pas sur les moyens, aussi traumatisants soient-ils, pour éradiquer le Covid-19. Il faut dire que le petit territoire chinois au statut administratif spécial est sous pression de Pékin pour afficher d’aussi bons résultats que le continent. Et comme l’ex-colonie britannique ne peut, elle, maquiller la réalité, elle emploie des mesures draconiennes pour parvenir à ses fins. Des méthodes dont s’émeut aujourd’hui la communauté d’expatriés confrontée au problème.

Hongkong se targue d’être le seul territoire au monde à prendre en charge chaque malade du Covid-19 et à isoler les cas suspects en quarantaine. Une prise en charge louable, à un détail près : la séparation déchirante des enfants et de leurs parents.

L’empathie n’est pas une priorité

Il y a un an, la quarantaine obligatoire venait d’être instaurée pour les personnes entrant à Hongkong. Le jour même où je revenais de France avec mes enfants. Par chance : elle était encore possible à domicile, sous surveillance téléphonique étroite des autorités. Moins de chance : nous avons développé des symptômes. Au bout de trois jours, devant la fièvre persistante, le verdict est tombé : «Nous arrivons dans 30 minutes, vous avez peut-être le Covid-19.»Impossible de négocier.

Mes enfants ont adoré suivre ces ambulanciers et leur quadruple protection blanche dans l’ascenseur de service (utilisé pour ne pas affoler nos voisins de la résidence). Ils ont ri d’être poussés en fauteuil dans les couloirs de l’hôpital, des couloirs pourtant si longs, si froids, si vides du personnel soignant caché derrière les portes vitrées à notre arrivée et qui nous épiait comme si nous étions la mort incarnée. Des sanglots ont chassé leurs sourires quand les portes du service de pédiatrie se sont refermées sur eux. Sans moi, admise dans un autre service.

A Hongkong comme ailleurs, le manque de personnel est criant dans les hôpitaux publics. L’empathie n’est donc pas une priorité. Or, elle fait cruellement défaut dans ces chambres à l’hermétisme asphyxiant. Elle manque aussi quand votre aînée de 6 ans vous appelle à l’aide jour et nuit sur le téléphone interne de l’hôpital, avec en fond la petite voix de son frère de 20 mois vous réclamant.

Des conséquences graves sur la santé mentale

Au final, mes enfants semblaient contents quand, au bout de cinq jours et un troisième test négatif, j’ai pu les rejoindre. Je les ai trouvés hypnotisés devant l’un des trois dessins animés prêtés par l’hôpital, noyés dans un amas de jouets et d’emballages de gâteaux apportés de l’extérieur. Au moins, ils n’auront pas été attachés aux barreaux du lit, contrairement à d’autres enfants pour qui l’expérience a dû être «peu plaisante», selon un euphémisme de l’autorité hospitalière.

Et que dire des bébés allaités arrachés à leur mère ? «Les conséquences sur la santé mentale de la séparation des familles sont graves à plus d’un titre, mais il y a des facteurs aggravants pour les mères qui allaitent», insiste le collectif #Ittasteslikelove. Même l’ONU stipule que les familles doivent rester ensemble et l’OMS recommande d’encourager les mères atteintes de Covid-19 à continuer d’allaiter.

Malgré des mois de supplications, le gouvernement hongkongais n’a cédé qu’à de rares exceptions. Beaucoup de parents vivent donc, comme le confie une autre maman, «avec la peur au ventre».


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