Des chercheurs français ont évalué comment un abus d’entraînement physique augmente notamment l’« impulsivité économique », par des questions du type : préférez-vous gagner 30 euros maintenant ou 50 dans une semaine ?
Sandrine Cabut Publié le 3 octobre 2019
10 000 pas et plus. Baisse inexpliquée des performances ; fatigue persistante ; perte d’appétit et de poids ; troubles du sommeil, de l’humeur… A trop forte dose, l’activité peut, comme tout médicament, devenir délétère. C’est le syndrome de surentraînement, qui touche des athlètes professionnels mais aussi des amateurs de sport d’endurance pratiquant de façon très intensive.
Si le sujet reste souvent tabou chez les champions, ce syndrome, qui correspond à une situation chronique, et le surmenage – sa forme débutante et plus facilement réversible – sont loin d’être exceptionnels. Chez les coureurs à pied, le risque de survenue d’un tel épisode irait ainsi de 30 % à 60 % sur l’ensemble de leur carrière sportive. Il s’agit aussi d’un sujet de préoccupation pour les entraîneurs de sportifs juniors : environ un tiers des jeunes pratiquant à haute dose seraient concernés.
Au moins dix heures par semaine
Mais que se passe-t-il dans le cerveau des athlètes quand leur corps est fatigué ? C’est ce qu’a exploré l’équipe de Mathias Pessiglione (Institut du cerveau et de la moelle épinière, Paris) chez trente-sept triathlètes de niveau compétition, s’entraînant au moins dix heures par semaine. Les résultats viennent d’être publiés dans la revue Current Biology, le 26 septembre.
Dans une étude précédente, les chercheurs français avaient montré qu’une surcharge de travail intellectuel, induite sur une journée, affecte le système de contrôle cognitif (PNAS, 2016). Sollicités par l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), ils ont reproduit leurs mesures chez ces triathlètes. La moitié d’entre eux ont conservé leur niveau d’entraînement, l’autre groupe a été soumis pendant trois semaines à des séances dont la durée était allongée de 40 %, pour induire un surmenage.
Sur le plan comportemental, la baisse de contrôle cognitif se traduit par une impulsivité
Pendant le protocole, d’une durée de neuf semaines, on a mesuré les performances cognitives des volontaires par des exercices de mémoire de travail et d’alternance de tâches, et les évaluations de leur « impulsivité économique » par des questions du type : préférez-vous gagner 30 euros maintenant ou 50 dans une semaine ? Certains tests ont été réalisés lors d’une IRM fonctionnelle.
« Nous avons retrouvé dans cette population de sportifs les deux mêmes marqueurs de fatigue cognitive que nous avions identifiés en induisant une surcharge intellectuelle, explique Bastien Blain, premier auteur de l’article dans Current Biology. Sur le plan comportemental, la baisse de contrôle cognitif se traduit par une impulsivité, avec recherche de récompenses immédiates. Et sur le plan neuronal, on observe une diminution d’activité du cortex préfrontal latéral gauche, une zone impliquée notamment dans le contrôle de soi. »
Perte de lucidité
Ces mécanismes pourraient expliquer la tentation du dopage, selon les auteurs. L’étude a d’ailleurs été financée par l’Agence française de lutte contre le dopage.
Pour Sébastien Ratel, enseignant-chercheur en physiologie de l’exercice à l’université Clermont-Auvergne, qui n’a pas participé à l’étude, les conséquences du syndrome de surentraînement ont été bien étudiées sur le plan clinique, hormonal, immunitaire… Mais l’intérêt de ce travail est d’avoir décrypté ce qui se passe dans le cerveau, et caractérisé la perte de lucidité observée chez certains sportifs.
Dans une étude précédente, les chercheurs français avaient montré qu’une surcharge de travail intellectuel, induite sur une journée, affecte le système de contrôle cognitif (PNAS, 2016). Sollicités par l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), ils ont reproduit leurs mesures chez ces triathlètes. La moitié d’entre eux ont conservé leur niveau d’entraînement, l’autre groupe a été soumis pendant trois semaines à des séances dont la durée était allongée de 40 %, pour induire un surmenage.
Sur le plan comportemental, la baisse de contrôle cognitif se traduit par une impulsivité
Pendant le protocole, d’une durée de neuf semaines, on a mesuré les performances cognitives des volontaires par des exercices de mémoire de travail et d’alternance de tâches, et les évaluations de leur « impulsivité économique » par des questions du type : préférez-vous gagner 30 euros maintenant ou 50 dans une semaine ? Certains tests ont été réalisés lors d’une IRM fonctionnelle.
« Nous avons retrouvé dans cette population de sportifs les deux mêmes marqueurs de fatigue cognitive que nous avions identifiés en induisant une surcharge intellectuelle, explique Bastien Blain, premier auteur de l’article dans Current Biology. Sur le plan comportemental, la baisse de contrôle cognitif se traduit par une impulsivité, avec recherche de récompenses immédiates. Et sur le plan neuronal, on observe une diminution d’activité du cortex préfrontal latéral gauche, une zone impliquée notamment dans le contrôle de soi. »
Perte de lucidité
Ces mécanismes pourraient expliquer la tentation du dopage, selon les auteurs. L’étude a d’ailleurs été financée par l’Agence française de lutte contre le dopage.
Pour Sébastien Ratel, enseignant-chercheur en physiologie de l’exercice à l’université Clermont-Auvergne, qui n’a pas participé à l’étude, les conséquences du syndrome de surentraînement ont été bien étudiées sur le plan clinique, hormonal, immunitaire… Mais l’intérêt de ce travail est d’avoir décrypté ce qui se passe dans le cerveau, et caractérisé la perte de lucidité observée chez certains sportifs.
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