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lundi 19 novembre 2018

Blessés psychiques de la Grande guerre : cachez ce mal que l'on ne saurait voir

15/11/2018
Par Camille Bichler

La Grande guerre n'a pas seulement meurtri le corps des hommes, elle a également laissé des séquelles moins visibles. Des centaines de milliers de soldats ont en effet développé des blessures psychiques.
Des Poilus prennent soin d'un soldat blessé au Front.
Des Poilus prennent soin d'un soldat blessé au Front.  Crédits : STR / HISTORIAL DE PÉRONNE - AFP
Greffes, prothèses et transfusions…  La Grande guerre a été un laboratoire à ciel ouvert pour la médecine. Mais si ce conflit mondial a permis de grandes avancées en chirurgie réparatrice, les médecins de l’époque ont bien souvent délaissé les maux invisibles, comme les troubles psychiques dus au traumatisme de la guerre. Car les combats n’ont pas seulement meurtri et lacéré les chairs. Les soldats traumatisés ont longtemps été dissimulés, par honte ou par désespoir. 

La folie, une « Honte » à la Patrie

Au front, les soldats côtoient la mort au quotidien, et vivent dans des conditions déplorables. Physiquement fragilisés, ils découvrent alors une maladie nouvelle, les troubles psychiatriques. Une pathologie difficile à distinguer, puisqu’elle peut se manifester sous différentes formes. Paralysie, mutisme, satiété, corps pliés, et tremblements, sont les symptômes de ces traumatisés. Pour Marie Derrien, historienne et maîtresse de conférence à l'université de Lille, les causes des traumatismes des Poilus ne peuvent se limiter à la violence des combats : 
Pour expliquer l’origine de ces traumatismes, on pense spontanément à la violence des combats et aux horreurs auxquelles ils sont soumis sur le front. Il est évident que les combats ont un impact sur la santé mentale des soldats. Mais lorsqu’on regarde de plus près les dossiers médicaux de certains soldats, il y a aussi des cas de soldats qui n’ont jamais été sur le front, certains sont internés dès l’annonce de leur mobilisation.
Dès octobre 1914, le ministère de la Guerre crée huit centres neurologiques régionaux en zone intérieure pour traiter les blessés nerveux. Le but ? Guérir les soldats le plus vite possible, pour les renvoyer sur le front. Car pendant la Grande guerre, l’armée française perd en moyenne 30 000 soldats par jour. Dans L’Esprit public du 25 août 2013, dédié à la violence de la guerre, l’historien Jean-Yves Le Naour revenait sur les troubles mentaux des Poilus, devenus tabou. À l’époque, la folie est perçue comme honteuse, et systématiquement dissimulée. Les soldats qui défendent la patrie sont vus comme des héros qui se doivent d’être forts :
Les nerfs, c’est l’étalon de résistance de la race. Les Allemands disent que les Latins sont une race impressionnable, qui ne tiendra pas. Les Poilus, eux, se vantent de leur solidité. Donc il ne peut pas y avoir de Poilus qui auraient des troubles mentaux, ça les ramènerait à la condition d’un homme fragile, débile et efféminé. Avant 1914, les maladies mentales sont cantonnées aux femmes. L’hystérie vient du mot utérus. Jean-Yves Le Naour

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