Ce témoignage, sous forme de roman graphique, fait aussi fonction de guide pour mieux comprendre cette maladie mentale.
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Par Sandrine Cabut
Le livre. Pendant une dépression, certains puisent du réconfort dans la lecture, qui est de plus en plus reconnue comme un outil thérapeutique – on parle de « bibliothérapie ». D’autres, écrivains professionnels ou non, célèbres ou anonymes, éprouvent un besoin irrépressible d’écrire, de raconter sous forme de témoignage ou de fiction le voyage souvent vertigineux qu’a été pour eux cette maladie mentale.
Avocat et réalisateur néo-zélandais, Brent Williams a, lui, opté pour un roman graphique. Bon choix. Illustré par de puissantes aquarelles du dessinateur de BD turc Korkut Öztekin, Je vais mieux, merci, qui vient de paraître aux éditions Tchou, embarque d’emblée le lecteur dans le tourbillon de ce passage si difficile de la vie, et ne le lâche pas.
Marié et père de quatre enfants (« merveilleux » qui plus est, cela va de soi), passionné par son travail, le narrateur se retrouve un beau jour submergé, égaré dans sa propre existence.
Il y a d’abord l’accumulation de symptômes qu’il ne sait pas – ou ne veut pas – décoder : fatigue, troubles du sommeil, pensées morbides, retrait social, douleurs diverses… Combien de personnes se reconnaîtront dans cette description typique, caricaturale, presque, de la dépression, mais tardent à consulter, pensant, comme Brent Williams, qu’ils pourront y arriver seuls, se « remettre dans le rythme… », et tombent des nues quand le médecin annonce le diagnostic ?
Réinvention de sa vie
Après le déni et la honte de se sentir malade viennent les difficultés à choisir un thérapeute qui convient, la fatigue physique et mentale qui perdure, puis progressivement l’acceptation, la redécouverte des petits et grands plaisirs de la vie, les retrouvailles avec les proches… Au fil des 162 pages de ce roman graphique, Brent Williams décrit en toute honnêteté, et candeur parfois, chaque étape de sa longue traversée, jusqu’à la réinvention de sa vie, la guérison.
Au-delà de ce récit très personnel, rendu plus saisissant encore par les illustrations de Korkut Öztekin, Je vais mieux, merci délivre des messages d’utilité publique pour apprivoiser et surmonter cette maladie si fréquente et méconnue qu’est la dépression.
L’enjeu est majeur. Touchant quelque 300 millions de personnes sur la planète, conduisant des centaines de milliers d’entre elles au suicide, il s’agit de la première cause d’incapacité au monde, selon l’Organisation mondiale de la santé. Dans sa dernière campagne sur le sujet, en 2017, l’organisation onusienne appelait d’ailleurs à une mobilisation générale pour lutter contre les préjugés et la stigmatisation des patients, avec pour slogan : « Dépression : parlons-en ». C’est bien ce que fait cet ouvrage.
« Toutes ces choses qui m’ont aidé à me soigner peuvent aussi vous aider… Mais tout le monde est différent, et chacun doit trouver sa propre réponse à la dépression », précise Brent Williams à la fin du livre. Et il insiste. « Ce qui est absolument certain, c’est que vous ne pouvez pas l’ignorer ou penser que vous vous en sortirez tout seul. » Il est convaincant.
« Je vais mieux, merci », de Brent Williams et Korkut Öztekin (Tchou, 162 p.
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