Crédit Photo : S. Toubon
Le froid tue dans la rue mais fait également souffrir les patients dans les hôpitaux.
« La malade a froid dans son lit, une parka, un pull en laine, une étole autour du cou. Pas très facile de vomir avec cet attirail. Grande lectrice, elle n'arrive pas à lire son dernier livre ayant trop froid aux mains. »
Le Pr Philippe Lévy, chef du service de pancréato-gastroentérologie de l'hôpital Beaujon (Assistance publique – hôpitaux de Paris), à Clichy, est l'auteur de ces lignes, notamment adressées par email ce mercredi à la directrice de l'établissement, Sabine Dumont, et au directeur du groupe hospitalier Paris Nord Val-de-Seine, François Crémieux.
La patiente est en fin de vie. Dans sa chambre, raconte le médecin, il fait 17 °C. Dehors, le thermomètre indique -7 °C.
« On lui a promis de scotcher les fenêtres, un traitement très moderne et esthétique pour assurer l’étanchéité. Ce n'est pas fait. On lui a promis un chauffage d'appoint. Il n'y en a pas. On lui a promis... une couverture. Il n'y en a pas non plus. […] Dans quel pays sommes-nous ? »
Fenêtres calfeutrées à l'adhésif
Le cas de cette patiente n'est pas propre à l'AP-HP mais aux hôpitaux un peu vieillissants, moins cotés et moins réputés que les grands, à l'avenir fragilisé. C'est le cas de Beaujon, voué à fusionner avec Bichat dans le cadre du projet de l'hôpital Nord, prévu pour 2024-2025. En attendant la construction du nouveau bâtiment, dans la ville voisine de Saint-Ouen, le Pr Philippe Lévy reproche en creux à sa direction l'arrêt des investissements.
Interpellé, François Crémieux a tenté de justifier cette mauvaise prise en charge : « L’hôpital Beaujon, ouvert en 1935, connaît des difficultés techniques récurrentes, en particulier pour le chauffage l’hiver et la climatisation l’été, écrit-il dans sa réponse au médecin. Des mesures palliatives sont mises en œuvre et les patients sont accueillis dans les meilleures conditions possibles. Ce jour, l’aile nord du bâtiment, soumise à des vents particulièrement froids, est difficilement chauffée autour de 20°, en particulier les chambres de bout d’ailes. Le réseau de vapeur qui alimente le bâtiment ne peut pas produire plus de chaleur au risque d’endommager voire de casser les tuyauteries. »
François Crémieux l'affirme : des couvertures supplémentaires et des radiateurs d’appoint ont été distribués « et de nouvelles fenêtres ont pu être calfeutrées avec de l’adhésif pour limiter les flux d’airs froids ». Il précise également que contrairement à ce que laisse entendre le Pr Lévy, le service incriminé doit être « entièrement rénové en 2018 pour un investissement global de cinq millions d’euros ». Il rappelle enfin que les « enjeux énergétiques font partie des raisons qui rendent impossible toute réhabilitation des bâtiments existants » de Beaujon, qui mettra bien la clé sous la porte.
Pas convaincu, le Pr Lévy anticipe le prochain coup du sort météorologique en attendant « l'hypothétique hôpital Nord » : la chaleur, l'été prochain. L'an passé, il avait déjà alerté la direction « car une température maximale de 41 °C [avait] été relevée dans une chambre et [il] ne parl[ait] pas ici de température rectale. »
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