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vendredi 9 février 2018

Les directeurs et CME des hôpitaux seront vigilants sur les suites des annonces pour la psychiatrie

Les représentants de la FHF, de l'Adesm et des commissions médicales d'établissement des CH, CHU et CHS attendent des "traductions concrètes" et un suivi de la mise en œuvre des mesures annoncées par Agnès Buzyn pour la psychiatrie. Du côté des libéraux, l'UFML estime pour sa part que le "compte n'y est pas" et avance ses propositions.
Les conférences hospitalières de directeurs et présidents de commissions médicales d'établissement (CME) expriment dans un communiqué commun le 7 février leur intention d'être "attentifs à ce que les annonces [d'Agnès Buzyn] puissent trouver leurs traductions concrètes sur le terrain avec des indicateurs de résultats". Ils indiquent qu'ils prendront dans ce cadre "leurs responsabilités pour y contribuer dans une démarche constructive en faveur de soins de qualité et de l'inclusion des personnes concernées". Ces réactions répondent aux douze mesures "urgentes" pour la psychiatrie et la santé mentale présentées par la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, le 26 janvier dernier au congrès de l'Encéphale (lire notre article). Des annonces qui ont déjà donné lieu à de nombreuses réactions parmi les acteurs de la psychiatrie publique et privée (lire notre dossier), saluant notamment le caractère prioritaire affiché par la ministre pour la discipline mais sur fond d'inquiétudes quant aux réponses ministérielles effectives au manque de moyens (financiers et humains) disponibles.

Rappel des alertes de terrain sur le manque de moyens

Les signataires du communiqué, à savoir les présidents de la FHF, de la Conférence nationale des directeurs de CH, de l'Association des établissements participant au service public de santé mentale (Adesm), les conférences nationales des présidents de CME de CH, CHU et CHS et la présidente de la Fédération nationale des usagers de la psychiatrie (Fnapsy) expriment des positions similaires. Ils voient tout d'abord dans le discours tenu "une reconnaissance sans ambiguïté" de la discipline et de l'action menée par les professionnels, patients et familles et saluent la confirmation de l'organisation sectorielle dans le système de soins et l'intérêt des communautés psychiatriques de territoire (CPT).

Ils soulignent ainsi nombre des engagements ministériels en matière de recherche, formation, prise en charge du suicide, des psychotraumatismes, soins somatiques, etc. La perspective d'indicateurs qualité pour les pratiques professionnelles en lien avec la Haute Autorité de santé (HAS) est aussi bien accueillie. Enfin, ils relèvent l'annonce de la "préservation" des moyens alloués. Cela répond "aux vives inquiétudesexprimées par l'ensemble des acteurs lors de la réunion du 18 décembre au ministère (lire notre article). Les signataires tiennent aussi à rappeler "les nombreuses motions émanant des établissements alertant sur leurs difficultés de fonctionnement, voire leur impossibilité de maintenir le niveau actuel de l'offre de soins au regard de leurs contraintes budgétaires, impactant directement les personnels" (lire notre interview).

Démographie médicale "en chute libre"

Mais pour les représentants de la psychiatrie au sein de l'Union française pour une médecine libre-Syndicat (UFML-S), "le compte n'y est pas" avec ces annonces. Jacqueline Goltman, vice-présidente de l'UFML-S et Thierry Asquier, tous deux psychiatres, soulignent que "la psychiatrie est en bout de course", avec notamment une démographie médicale "en chute libre", et que la simple préservation des budgets ne suffira pas.

Et de fournir des chiffres en ce sens. Le secteur libéral représente 26,7% de la cohorte des psychiatres dont 11,2% opèrent en exercice mixte, indique le syndicat. "La moyenne d'âge des psychiatres est actuellement de 53 ans, ce qui annonce un horizon catastrophique en 2020", poursuivent-ils, ajoutant que Paris, "zone soi-disant surdotée, a perdu en dix ans 21% de ses psychiatres libéraux". De plus, une sous-évaluation du tarif de la consultation est notoire, affirment-ils, fixée à 46,7 euros (€) alors qu'elle "est évaluée à 75 ".
"Comment répondre à la pénurie actuelle [de psychiatres hospitaliers et libéraux] en s'appuyant sur une médecine générale déjà débordée ?"
Représentants de l'UFML
Par ailleurs, "30% des postes de praticiens hospitaliers sont vacants et nombre de soignants travaillent en effectif réduit, en intérim et/ou avec des contrats précaires", poursuivent-ils. Quant à la pédopsychiatrie, elle est "déjà sinistrée puisque l'on estime qu'il ne reste que 540 pédopsychiatres libéraux pour toute la France". Ils signalent qu'il y a aujourd’hui "deux ans d'attente" pour obtenir un rendez-vous dans un centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) en Seine-Saint-Denis et qu'à Paris, "six lits seulement sont disponibles dans le centre d'accueil et d'hospitalisation pour adolescents le plus réputé [...] et on compte un seul lieu d'urgence à l'hôpital pour les adolescents de moins de 15 ans".
Et "comment répondre à la pénurie actuelle en s'appuyant sur une médecine générale déjà débordée ?", s'interrogent les représentants du syndicat, en écho aux annonces d'Agnès Buzyn sur une formation en psychiatrie et santé mentale pour 100% des futurs généralistes.

Six propositions de l'UFML

Les représentants de l'UFML formulent en conséquent six propositions pour la discipline :
  • sortir la filière psychiatrique des groupements hospitaliers de territoire (GHT), et créer "une filière autonome, ayant son propre budget de recherche et de formation" ;
  • réviser les contrats précaires en institutions ;
  • ouvrir aux généralistes la possibilité d'effectuer un trimestre dans le cabinet d'un psychiatre libéral, en clinique privée ou en centre médico-psychologique (CMP) ;
  • remettre en vigueur une formation spécifique diplômante au-delà des trois années d'études des infirmières ;
  • revaloriser la consultation psychiatrique à hauteur de trois consultations chez un généraliste et "ainsi s'aligner sur les valeurs européennes" ;
  • ouvrir aux internes la possibilité de réaliser un semestre validant pour la maquette du diplôme d'études spécialisées (DES) de psychiatrie, dans le cadre d'un cabinet libéral ou dans une clinique psychiatrique privée.
Caroline Cordier
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