| 17.01.2018
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« Crier, frapper, hurler, humilier son enfant, c'est le marquer pour longtemps » : avec ce slogan, la nouvelle campagne de prévention contre les violences éducatives ordinaires entend marquer les esprits pour faire évoluer les pratiques éducatives dans notre pays encore trop imprégné de « l'injonction de dresser les enfants pour qu'ils soient obéissants », estime le Dr Gilles Lazimi, coordinateur de la campagne.
Modifier les pratiques
Lancée par la Fondation pour l'Enfance, en partenariat avec l'agence Josiane, et France Télévisions, cette campagne souhaite amener les parents à « réfléchir et à changer ces mauvaises habitudes souvent héritées de [leur] éducation » via, en particulier, la diffusion de deux spots télévisés de sensibilisation et de prévention à la télévision et sur les réseaux sociaux.
Selon la Fondation pour l'Enfance, « 85 % des parents français utilisent ces violences dites éducatives et plus de 50 % des parents commencent à frapper leur enfant avant l’âge de deux ans, persuadés par l’éducation qu’ils ont reçue que cela leur a été utile et profitable ».
Pour l'agence Josiane, qui a conçu et réalisé la campagne, il est important de s'adresser aux parents de manière éducative, non culpabilisante. « La violence éducative ordinaire, ce sont des parents qui aiment leurs enfants, mais qui leur font subir ces violences parce qu'ils ne savent pas qu'à long terme cela leur est néfaste. »
Or, toute forme de violence, qu'elle soit physique, verbale ou psychologique, peut avoir un retentissement négatif sur l'enfant. « De nombreuses études, canadiennes et américaines, montrent à quel point ces violences peuvent provoquer des dégâts, sur la vie, sur la relation aux autres, l'estime de soi, l'assurance, l'anxiété, le stress qui, lui-même, peut entraîner des pathologies », souligne le Dr Lazimi. Selon lui, « on ne pourra faire quelque chose que lorsqu'il y aura une loi qui interdira toute violence envers les enfants ».
Une loi en préparation
À l’heure actuelle, alors que 53 pays dont 23 en Europe ont interdit par la loi les violences éducatives ordinaires en direction des enfants, il n'existe pas de loi qui stipule que l'éducation doit se faire en dehors de toute forme de violence.
Une proposition de loi est, cependant, en cours d'élaboration en France. Préparée notamment par Maud Petit, députée Modem du Val-de-Marne, et François-Michel Lambert, député LREM des Bouches-du-Rhône, elle a pour objectif « non pas de sanctionner, mais d'accompagner les parents, les écouter et leur rappeler que l'on peut faire autrement », souligne Mme Petit. « Il est important de poser les choses, de les graver dans le marbre et d'éduquer les parents, d'éduquer la société par des propos qui seront répétés régulièrement, à l'occasion d'un mariage, à la maternité, en PMI, en crèche ou à l'école. »
Pour Marie Derain, secrétaire générale du Conseil national de protection de l'enfance, pour qui « ce n'est pas la loi qui fait prioritairement bouger les choses sur les questions d'éducation », le débat qui entourera cette proposition de loi au Parlement aura le mérite de faire « déborder dans les autres lieux » la question des violences éducatives ordinaires. Mais cette loi devra également s'accompagner de « démarches éducatives, pédagogiques dans tous les lieux qui accueillent les enfants car, au-delà des parents, il y a toute la question des institutions et des lieux institutionnels qui sont encore parfois violents simplement dans leurs organisations avec les enfants », souligne-t-elle.
Le médecin, acteur de la prévention
Les professionnels de santé ont un rôle majeur à jouer dans la lutte contre les violences éducatives ordinaires, estime le Dr Lazimi. « L'entretien prénatal précoce peut être un bon moment pour sensibiliser les parents », souligne-t-il. Mais la prévention peut également se faire dans le cabinet du médecin : « Lors d'une consultation médicale, le professionnel peut repérer une attitude violente d'un parent, physique ou verbale, et intervenir, discuter avec le parent et poser la question des violences pour alerter sur leur impact sur la santé de l'enfant », conclut-il.
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