Tous les professionnels de l'enfance, qu'ils travaillent dans le secteur du handicap, de l'éducation, de l'aide sociale ou de la justice des mineurs, sont confrontés à des enfants en grandes difficultés psychologiques. Dans un guide de recommandations, l'Anesm propose une méthodologie pour améliorer l'accompagnement de ces jeunes à fleur de peau.
Le guide L'accompagnement des enfants ayant des difficultés psychologiques perturbant gravement le processus de socialisation (à télécharger ci-dessous) de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm), mis en ligne en cette fin décembre, s'adresse à la fois aux professionnels du secteur handicap et à ceux des services de protection de l'enfance. Les recommandations identifient les pratiques qui permettent de mieux comprendre les difficultés psychologiques de l'enfant, de mieux coordonner les interventions et définir les priorités afin d'éviter un morcellement dans l'accompagnement, le défaut de compréhension et d'adhésion de l'enfant et/ou de ses parents, et les ruptures de parcours. Elles promeuvent des outils spécifiques, tout particulièrement d'évaluation interinsititutionnelle et interdisciplinaire, qui permettent l'ajustement des pratiques et des accompagnements.
Des enfants qui restent en protection de l'enfance
Les troubles du comportement sont surreprésentés chez les enfants et adolescents suivis par les services de protection de l'enfance. Ainsi, par exemple, une étude croisée maison départementale des personnes handicapées (MDPH) et aide sociale à l'enfance (ASE) dans les Bouches-du-Rhône en 2015 a montré qu'il existait chez les enfants de l'ASE, sept fois plus de dossiers concernant un handicap que dans le reste de la population. Ces enfants bénéficiant de mesures de placement sont, pour la plupart, orientés vers un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep), un service d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad), un institut médico-éducatif (IME) ou vers les dispositifs de psychiatrie infanto-juvénile, et parfois les deux à la fois. Mais constate l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm), "en fonction des départements et de l'offre de services des établissements/services médico-sociaux d'une part, et de la psychiatrie infanto-juvénile d'autre part, la prise en compte de ces besoins peut s'avérer problématique et la réalité des besoins de ces enfants particulièrement aiguë".Par ailleurs, le défenseur des droits indique dans son rapport 2015 Handicap et protection de l’enfance : des droits pour des enfants invisibles que la justice peut être saisie directement en raison d'un handicap de l'enfant et ordonne, par défaut d'offre de structures d'accueil spécialisé sur le territoire, un établissement de la protection de l'enfance.
Pour les professionnels du secteur social, médico-social, sanitaire, de l'éducation et de la justice des mineurs, la réponse adaptée aux besoins de ces enfants représente une préoccupation et un enjeu important d'accompagnement. Ils sont parfois décontenancés par l'intensité, l'exacerbation et la réitération des expressions de souffrance psychologique qui impactent gravement les processus de socialisation et les apprentissages et peuvent porter atteinte à la sécurité des enfants et de leur entourage.
Un "pilote", une meilleure coordination et des solutions relais
L'Anesm pointe les bonnes pratiques professionnelles visant l'accueil et l'admission de l'enfant en mettant l'accent sur la mobilisation des ressources disponibles sur le territoire, et notamment la coopération entre les secteurs de la protection de l'enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), le secteur du handicap mais aussi celui de la pédopsychiatrie et l'Éducation nationale. Il faut mobiliser toutes les ressources, mieux coordonner les interventions et désigner clairement un "pilote" du projet d'accompagnement. L'Anesm invite les intervenants à ne pas hésiter à se proposer comme coordinateur à l'autorité de décision de référence (ASE, MDPH, PJJ) si aucun coordinateur n'est identifié. Elle propose de se mettre d'accord sur les modalités d'écriture des informations transmises entre les différents établissements et services engagés et en vérifiant qu'elles sont bien adaptées à la compréhension de l'enfant et des titulaires de l'autorité parentale.
L'Anesm rappelle l'importance de sécuriser l'enfant en lui rappelant que l'établissement/service ne le rejettera pas ; qu'en cas de difficultés, des solutions de relais sont prévues si une trop grande pression s'exerce sur lui ou son entourage. Des solutions qui représentent pour lui une opportunité de "respiration" et de "mise à distance/mise au repos" temporaire. Elle invite les établissements à individualiser le niveau de socialisation de l'enfant, à bien repérer ses facteurs de stress et les stratégies d'ajustement et à adapter autant que possible les modalités de la vie quotidienne dans le contexte collectif.
Construire un projet d'accompagnement personnalisé et évolutif
Afin de permettre la mise en place d'un processus de résilience, les recommandations abordent la construction du projet personnalisé de l'enfant et mettent en avant l'importance de l'adaptation éducative, sociale et thérapeutique dans les processus d'accompagnement, tenant compte des difficultés sociales de chaque enfant. Les stratégies d'évitement et/ou de rupture de ces enfants rendent plus complexe la construction du projet. Une formalisation hâtive comporte le risque de faire échouer l'accueil ou le projet lui-même, si celui-ci ne repose pas sur une évaluation initiale suffisamment approfondie ainsi que sur l'identification d'une gradation des objectifs.
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