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lundi 9 octobre 2017

Au pays des merveilles et de la dépression

Le Monde Blogs par Marc Gozlan      

L’histoire est celle d’un homme de 75 ans qui ressent d’étranges symptômes. Il a la sensation que ses membres et son sexe sont plus petits qu’ils ne le sont. Cette distorsion visuelle de la taille du corps est une des caractéristiques de ce que les neurologues appellent le « syndrome d’Alice aux pays des merveilles » (SAPM), un trouble caractérisé par une combinaison d’hallucinations visuelles, des anomalies de l’image corporelle et une distorsion de l’espace et du temps. Ce syndrome s’observe principalement dans des pathologies neurologiques, comme la migraine et l’épilepsie. Il a cependant été décrit dans de très rares cas d’infections, comme je l’ai relaté l’an dernier dans un billet de blog.

Le cas décrit dans le numéro d’octobre 2017 de la revue L’Encéphalepar des psychiatres toulousains concerne un patient septuagénaire qui a présenté un syndrome d’Alice aux pays des merveilles (SAPM). Celui-ci a précédé l’apparition d’une dépression sévère avec tristesse, anxiété et idées d’incurabilité et de ruine.
Cet épisode dépressif à caractère mélancolique est survenu en avril 2009. Un traitement antidépresseur est mis en route avec augmentation progressive des doses. 
Constatant une absence d’efficacité, il est décidé d’ajouter un autre antidépresseur, puis d’y adjoindre un troisième médicament, un régulateur de l’humeur. Le traitement étant toujours inefficace, les médecins décident de réaliser une électroconvulsivothérapie (ECT ou électrochocs) en association avec le traitement médicamenteux antérieur. Après sept séances d’ECT, à raison de deux par semaine, le patient entre en rémission. Un traitement de consolidation est entrepris. Il dure six mois et consiste en l’administration de deux antidépresseurs et la réalisation d’une séance d’ECT une fois par mois.

Trois ans plus tard, en juin 2012, alors qu’il est toujours sous antidépresseur, le patient ressent à nouveau de curieux symptômes, ayant « l’impression que les choses sont à l’envers ». Au bout de 15 jours, un diagnostic est établi : le patient présente un nouvel épisode dépressif avec des éléments de tristesse, une difficulté dans la capacité à éprouver du plaisir (anhédonie), à passer à l’action (aboulie), une anorexie. Il est alors hospitalisé. Là encore, le traitement initial et de consolidation comporte antidépresseurs et séances d’ECT. Au bout de six mois, le traitement d’entretien se résume, comme lors du premier épisode dépressif, à la prise d’un seul antidépresseur.


En août 2015, le patient présente une fois encore des sensations de réductions de taille associées à des réductions de membre : « je rétrécis », « je m’enfonce dans le sol », symptômes qui correspondent à un syndrome d’Alice au pays des merveilles. Cette fois, une hospitalisation est décidée sans attendre afin de prendre en charge le plus rapidement possible ce patient qui fait une rechute de l’épisode dépressif. Il présente une tristesse de l’humeur, associée à une anorexie responsable d’une perte de poids de 5 kilos en 2 semaines, un ralentissement psychomoteur et une insomnie de fin de nuit. Ces symptômes sont associés à des idées délirantes de « ruine ». Le patient est de nouveau traité par antidépresseurs et séances d’ECT.


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