L’importance de la recherche pour renforcer notre compréhension des maladies et l’efficacité des thérapeutiques proposées n’est plus à démontrer : selon un aphorisme célèbre, « le médecin gagne sa vie avec ce qu’il sait déjà, et le chercheur avec ce qu’il ignore encore. » Cela vaut aussi, bien sûr, pour les maladies mentales. Cependant, le nombre des jeunes chercheurs diminue, notamment en Amérique du Nord, et ce déclin de la recherche médicale « est encore plus significatif en psychiatrie » rappellent des psychiatres canadiens.
Les auteurs ont consacré une étude à ce sujet, à partir d’une enquête en ligne réalisée auprès de 853 résidents en psychiatrie exerçant au Canada. Premier constat, déjà révélateur : seuls 207 de ces jeunes professionnels (soit 24,3 %) ont accepté de répondre à l’enquête, ce qui peut laisser supposer que les résultats (peu reluisants sur la place concrète de la recherche en psychiatrie) sont affectés en plus d’un biais de sélection, dans la mesure où les sujets ayant participé effectivement à l’étude sont pourtant les plus motivés par la recherche, les autres (3/4 des jeunes psychiatres) étant vraisemblablement restés à l’écart de cette enquête.
Loin de la théorie à la pratique
Il n’est donc pas étonnant de vérifier ainsi le seul résultat rassurant de cette étude, à savoir la confirmation de « l’intérêt de la recherche comme faisant partie de la future pratique psychiatrique des intéressés. » Malheureusement, la réalité des pratiques professionnelles ne s’accorde pas avec cette flatteuse considération théorique sur la place de la recherche : on observe en effet une « diminution de 76 % de cet intérêt pour la recherche entre la première et la cinquième année du résidanat en psychiatrie » (Odds ratio = 0,76 par année [intervalle de confiance à 95 % 0,60–0,97] ). Un autre phénomène semble encore plus préoccupant : même le fait d’effectuer sa formation universitaire dans un service « doté d’un volet de recherche » ne contribue pas à renforcer le goût des résidents pour la recherche, puisqu’on n’observe « aucune corrélation entre cette formation » (auprès de chercheurs seniors susceptibles d’être pris pour modèles) et un éventuel « intérêt accru pour la recherche » chez ces futurs psychiatres (χ2 = 0,007 ; p = 0,93).
Dans l’espoir de contrecarrer cette désaffection croissante des jeunes psychiatres pour la recherche, cette enquête incite donc à « engager les résidents en psychiatrie vers la recherche dès que possible », et à promouvoir « les initiatives de formation en recherche dès le début » du résidanat.
Dr Alain Cohen
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