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samedi 6 avril 2024

Le billet de Jonathan Bouchet-Petersen Aide sociale à l’enfance : il faut entendre les mots sévères mais justes de Lyes Louffok

par Jonathan Bouchet-Petersen   publié le 5 avril 2024

Auditionné mercredi 3 avril à l’Assemblée nationale, le militant, lui-même ex-enfant placé, a une nouvelle fois sonné la charge en citant des chiffres qui donnent le vertige.

Quand la maltraitance s’ajoute à la détresse d’enfants qu’il s’agit de mettre à l’abri, il y a tout lieu de crier au scandale. Dans un livre, dans la presse, sur les plateaux télé et radio, mais aussi via une fiction et jusque dans l’enceinte de l’Assemblée nationale, Lyes Louffok tire inlassablement la sonnette d’alarme sur la situation de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), qui gère le sort de plus de 300 000 mineurs et de quelques dizaines de milliers de jeunes majeurs. Ses mots sont toujours forts pour dénoncer l’incurie d’un Etat trop souvent défaillant, mais ils sonnent juste. Ce mercredi 3 avril au Palais-Bourbon, celui qui a qui a écrit un livre intitulé Dans l’enfer des foyers et qui a été confié à différentes familles d’accueil jusqu’à ses 18 ans, pour le meilleur comme pour le pire, était auditionné devant la représentation nationale. Une nouvelle occasion de sonner la charge, c’est son rôle.

Des destins fragiles

S’il serait excessif de dire que rien n’a été fait ces dernières années pour tenter d’améliorer les choses, le compte n’y est clairement pas et trop de mesures de protection décidées par la justice ne sont tout simplement pas exécutées. Les chiffres cités mercredi par Lyes Louffok et qui font écho à certains articles de presse, continuent de donner le vertige. 1 100 enfants non ou mal placés dans le Nord, 150 dans le Maine-et-Loire, 450 dans la Sarthe, 200 en Alsace, etc. Autant de destins fragiles qui le sont d’autant plus faute d’une prise en charge à la hauteur. Et, sans que ce soit une surprise, le sort des mineurs étrangers est encore plus rude.

La question de la non-réponse à des signaux d’alerte de maltraitance est également un sujet majeur, tout comme le nombre de familles d’accueil, qui a tendance à baisser du fait d’une hausse des départs en retraite quand les besoins, eux, augmentent. Quant aux foyers, où des associations plus ou moins vertueuses et plus ou moins soutenues par la puissance publique se démènent, ils restent des lieux inadaptés pour de nombreux enfants même si l’hébergement en hôtel doit le plus possible être évité. La fin de la prise en charge dès l’âge de 18 ans, ce qu’on appelle comme en prison les «sorties sèches», est aussi un élément qui pèse très durement sur le devenir de ces enfants, surreprésentés parmi les personnes sans abri. Tout cela demande des financements, de la formation et des politiques publiques à la hauteur.

Une expertise utile

Alors qu’une commission d’enquête parlementaire initiée par les députés socialistes et chargée d’ausculter les dysfonctionnements de l’Aide sociale à l’enfance va voir le jour mi-avril, environ 80 anciens enfants placés viennent de créer un Comité de vigilance pour faire entendre leur voix avec le soutien de l’association les Oubliés de la République, dont Lyes Louffok est le vice-président. Leur objectif est d’empêcher que ces travaux se limitent à un dialogue sur le manque de moyens entre l’Etat et les départements, ces collectivités en première ligne sur le sujet, cantonnant au rôle de témoins les principaux concernés, qui revendiquent très justement une expertise utile. Et comme ils le martèlent à raison, «au-delà des dysfonctionnements du système, il ne s’agit pas seulement du combat d’anciens enfants placés, mais plutôt de savoir dans quelle société nous voulons tous vivre».


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