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Dans un monde saturé d’informations et de publicités, savoir capter l’attention du consommateur est devenu un enjeu majeur de la société capitaliste. Théorisée par la branche peu connue de la science économique appelée « économie de l’attention », cette évolution essentiellement due aux nouvelles possibilités d’attractivité qu’offre le numérique redéfinit la notion même d’attention, chère aux philosophes. Mais à quel prix ?
Marc Aurèle : l’attention comme contrôle de soi
C’est peut-être chez les stoïciens qu’on trouverait une première réflexion sur l’attention, où celle-ci apparaît comme une condition de la maîtrise de soi. Pour savoir se contrôler, il convient d’abord de ne pas accorder d’importance à ce qui nous distrait. Si, par exemple, un bruit terrifiant comme le tonnerre n’ébranle pas l’âme du sage, c’est parce qu’il refuse de donner son assentiment à son imagination tentée d’associer le grondement du ciel à une colère divine. Non pas ignoré mais réduit à sa portion congrue, l’évènement perturbateur doit être en outre enfermé dans le temps de son surgissement : le présent. Ainsi ces effets ne risquent-ils pas d’être amplifiés. Marc Aurèle résume en une formule cette injonction salvatrice à l’attention : « Efface la représentation. Arrête cette agitation de pantin. Délimite le moment présent. » (Pensées pour moi-même, VII, 54) Être attentif, c’est contrôler notre rapport au réel. Mais est-ce vraiment le comprendre ?
Descartes : l’attention comme condition d’accès au vrai
L’attention est davantage interprétée par Descartes comme une forme de concentration extrême. Elle forme une sorte de faisceau qui s’intensifie lentement jusqu’à permettre de voir la vérité perçue alors comme une évidence. Exercer son attention requiert de procéder par ordre et de ne pas hésiter à attarder son esprit sur les objets les plus accessibles. Comme l’expliquent les Règles pour la direction de l’esprit (1629) : « Il faut tourner toutes les forces de son esprit vers les choses de moindre importance et les plus faciles, et s’y arrêter longtemps, jusqu’à ce qu’on soit accoutumé à avoir l’intuition claire et distincte de la vérité. » (Règle IX) L’attention acquiert donc avec Descartes une valeur méthodologique. Être attentif s’apprend et finit par rendre perspicace, c’est-à-dire capable de distinguer le vrai du faux. Mais, ainsi conçue, l’attention ne risque-t-elle pas d’être confondue avec une simple représentation des qualités objectives de la réalité perçue ?
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