Pour lutter contre ses insomnies, il est recommandé d’opter en priorité pour des solutions non médicamenteuses. Elles sont nombreuses. Le point sur celles à privilégier… et les autres.
En temps normal, 1 Français sur 5 souffre de difficultés d’endormissement, de réveils nocturnes multiples et de réveils précoces. Avec la pandémie de Covid, ce type de troubles est devenu plus courant : après le premier confinement de 2020, la consommation de somnifères a augmenté de + 6,9 %. Transitoire, l’insomnie n’est pas alarmante. Mais gare si elle survient plus de 3 fois par semaine et dure plus de 3 mois, car l’insomnie chronique peut littéralement gâcher la vie. Des solutions non médicamenteuses existent, mais toutes ne se valent pas.
À PRIVILÉGIER
Hygiène du sommeil
La première solution consiste à adopter plusieurs gestes simples qui favorisent un bon sommeil et dont l’efficacité a été prouvée.
- Dormir selon ses besoins, 7 h pour certains, plus ou moins pour d’autres.
- Se lever et se coucher à horaires réguliers, même le week-end, pour ne pas dérégler son horloge biologique. Et s’exposer à la lumière le matin pour synchroniser cette horloge à la journée de 24 h.
- S’abstenir de consommer café, thé et autres stimulants au moins 5 heures avant le coucher. Éviter les écrans au moins une heure avant d’aller au lit, car leur lumière bleue inhibe la sécrétion de mélatonine, une hormone clé du sommeil.
- Pratiquer une activité physique régulière, qui accroît la « pression du sommeil ». L’arrêter au moins 3 h avant le coucher, car toute augmentation de la température corporelle peut décaler l’horloge biologique et donc l’endormissement. Pour la même raison, dormir dans une pièce non surchauffée, à 18-20 °C, et de préférence obscure et silencieuse.
- Éviter les repas copieux et/ou gras le soir : ils prolongent la digestion qui peut perturber l’endormissement.
Si ces règles ne suffisent pas, ce qui est possible en cas d’insomnie chronique ou d’un autre trouble sous-jacent (hyperthyroïdie, maladie de Parkinson…), en parler à son médecin.
Thérapie comportementale et cognitive (TCC)
La TCC est le traitement de première intention recommandé par les autorités de santé en cas d’insomnie chronique et d’échec d’une meilleure hygiène de sommeil. Brève (car nécessitant 6 à 8 séances au maximum), et procurant des bénéfices durables, la TCC permet d’identifier les mécanismes à l’origine des difficultés afin d’expérimenter de nouveaux comportements et de retrouver un sommeil plus continu et réparateur.
La TCC comprend un volet comportemental, destiné à améliorer les habitudes liées au sommeil, et un volet cognitif visant à modifier les fausses croyances (« il faut dormir 8 heures par nuit » ou « il faut être endormi avant une certaine heure »…) et à réduire le stress (nocif pour l’endormissement). Elle peut intégrer plusieurs approches relaxantes : hypnose, sophrologie, méditation, etc.
Réalisée en groupe ou en entretien individuel, la TCC est encadrée par un psychologue ou un psychiatre formé à cette approche. À partir de 2022, des consultations de psychologue prescrites par un médecin devraient être partiellement remboursées.
Il existe des TCC sur Internet. Elles ont l’avantage d’être faciles à suivre (via son smartphone, sa tablette ou son PC) et ont prouvé leur efficacité lors de plusieurs essais. Le programme ThéraSomnia, par exemple, a été validé cliniquement à l’hôpital de Montpellier. Ce sont des formules payantes. Regardez bien les offres, les tarifs n’étant pas toujours lisibles derrière d’apparentes promotions.
Pas de somnifères au long cours
Les somnifères (pour l’essentiel des benzodiazépines) sont dans certains cas une solution efficace s’ils sont pris ponctuellement ou sur une courte durée. Par contre, leur usage régulier et à long terme (sur plus d’un mois) provoque souvent une forte dépendance et des symptômes de sevrage en cas d’arrêt brutal (anxiété, insomnie). De plus, ils ont des effets secondaires : oubli de faits récents, troubles de la vigilance, etc.
EN COMPLÉMENT
Phytothérapie
Valériane, aubépine, tilleul, camomille, passiflore, mélisse, etc. Plusieurs plantes médicinales sont réputées diminuer les troubles de l’endormissement et la nervosité. La valériane est celle dont l’intérêt est le mieux étudié. Elle semble améliorer la qualité du sommeil et a même été testée en remplacement des somnifères. Mais à ce jour, aucune plante n’a démontré rigoureusement son efficacité.
Toutes ces plantes agissent certainement via l’effet placebo : elles favorisent le sommeil parce qu’on s’attend à ce qu’elles fonctionnent. Elles peuvent aussi aider à mieux dormir par un effet « rituel » : leur consommation régulière, leur odeur ou leur goût agréable, devenant associés à l’endormissement, le facilitent. Sous forme de tisanes, elles entraînent une dilatation de l’estomac qui stimule un nerf dit pneumogastrique, lequel favorise l’endormissement et renforce donc leur effet sédatif.
Comme elles sont dénuées d’effets indésirables, ces plantes médicinales méritent d’être essayées.
Applis apaisantes
Depuis quelques années, on trouve sur Internet des applications proposant des séances de méditation ou d’écoute de sons reposants (bruit de vagues, souffle de vent, cricri de grillons…), comme Petit Bambou, Calm, Relax Melodies ou White Noise. Gratuits pour la plupart, ces outils focalisent l’esprit sur des sons relaxants, aidant ainsi à occulter les pensées stressantes qui empêchent l’endormissement. Ceci dit, une musique apaisante de sa propre playlist fait souvent l’affaire.
Quoi qu’il en soit, ces applis ne peuvent suffire à elles seules. Il convient de les inclure dans une démarche globale d’amélioration de l’hygiène de vie.
Mélatonine
Vendue librement sous forme de complément alimentaire, ou sur prescription médicale au-delà de 2 mg, la mélatonine est une hormone sécrétée normalement la nuit par notre cerveau. Selon une étude brésilienne ayant porté sur 1 683 patients, « elle diminue le délai de l’endormissement et augmente la durée totale du sommeil », avec une efficacité significative en comparaison de celle d’un simple placebo. Elle peut être utile en cas d’insomnies dues à un décalage horaire (pour resynchroniser l’horloge biologique à l’heure locale) ou d’insomnies liées à des troubles des rythmes biologiques responsables de couchers très tardifs ou de levers très précoces (pour avancer ou retarder l’horloge biologique).
Avant de recourir à la mélatonine, mieux vaut au préalable observer les règles d’hygiène du sommeil listées plus haut. Car elle n’est pas sans effets indésirables : somnolences, maux de tête, éruptions cutanées diverses, vomissements, etc. De plus, elle interagit avec beaucoup de médicaments (somnifères, certains antihypertenseurs, corticoïdes...).
Luminothérapie
La luminothérapie consiste à s’exposer à une lumière blanche intense pendant 30 à 45 minutes chaque jour. Prendre son petit-déjeuner le matin dans une pièce bien éclairée est un bon début. Comme l’ont montré plusieurs travaux, la luminothérapie est parfois efficace contre les insomnies liées à un retard de l’horloge biologique ou à une dépression saisonnière. La lumière arrêterait la sécrétion de l’hormone mélatonine, ce qui permet de recaler l’horloge biologique. Sur le marché, il existe des lampes spéciales « luminothérapie ».
En cas de décalage important des rythmes biologiques, quelques centres du sommeil et services de psychiatrie, notamment ceux de l’hôpital Bichat et de l’Hôtel-Dieu à Paris, proposent des séances de luminothérapie encadrées.
Dispositifs électroniques • On s’en passera volontiers
Coûteux, mal évalués et peut-être contre-productifs, les divers gadgets de sommeil assisté par l’électronique n’ont guère d’arguments en leur faveur. Depuis quelques années fleurissent des solutions hight-tech telles que boîtiers, bracelets ou bandeaux, qui prétendent vous aider à retrouver le sommeil.
Les boîtiers
Il s’agit de boîtiers à placer sur sa table de nuit. Exemples : Dodow diffuse une lumière bleue au plafond s’intensifiant et s’atténuant régulièrement ; Morphée propose des séances de méditation et de sophrologie guidées par une voix. Sur le principe, ces boîtiers permettent de se relaxer et d’atténuer un stress ou une angoisse nuisant à l’endormissement. Mais ils nécessitent un certain budget (de 50 € à 100 € environ), alors qu’un bon livre, une appli ou une musique apaisantes suffisent bien souvent.
Les objets connectés
Montres, bracelets, bagues et même oreillers se proposent désormais d’analyser notre sommeil en enregistrant la fréquence cardiaque, les mouvements du corps, la respiration et les ronflements. Ils renseignent sur notre sommeil (durée, présence de ronflements…) mais ne sont pas toujours fiables. Et surtout, ils donnent très peu de conseils pour mieux dormir. De plus, ils s’avèrent parfois contre-productifs. En effet, s’ils conduisent à une quête obsessionnelle de sommeil sans insomnie, ils peuvent accroître l’anxiété au coucher et ainsi empêcher de dormir.
Les dispositifs cérébraux
Le bandeau Dreem et le casque Urgonight ambitionnent d’enregistrer notre activité cérébrale et de restructurer le sommeil via, respectivement, un programme inspiré de la TCC et des exercices cérébraux sur appli mobile. Des résultats positifs ont été montrés, mais des études plus poussées sont nécessaires pour établir l’efficacité de ces systèmes très coûteux : environ 400 € pour Dreem et 500 € pour Urgonight.
Experts consultés : Dr Marc Rey, neurologue, président de l’Institut national du sommeil et de la vigilance ; Dr Sylvie Royant-Parola, psychiatre, présidente du Réseau Morphée.
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