par Olivier Monod
«Il est prématuré de considérer que le pic est dépassé.» Le point épidémiologique hebdomadaire de Santé publique France a fait l’effet d’une douche froide ce vendredi. Alors que la France baignait dans une séquence de communication de l’exécutif axée sur la sortie prochaine du long tunnel de la pandémie, les chiffres de cette fin de semaine font mal. Plus de 500 000 cas recensés en vingt-quatre heures, une incidence sur sept jours qui dépasse les 3 200 pour 100 000 habitants. La France continue de caracoler dans le peloton de tête des pays les plus touchés par la contamination.
La semaine avait pourtant commencé par l’optimisme d’Arnaud Fontanet, épidémiologiste à l’Institut Pasteur sur France Inter,lundi matin : «Oui, le scénario du pire s’éloigne, la décrue a commencé», affirmait-il. Son confrère suisse Antoine Flahault considérait plutôt que la France se dirigeait vers le sommet de son pic. Libération titrait sur l’espoir à l’horizon.
Le gouvernement a profité de l’accalmie annoncée pour déployer son calendrier de levée des mesures barrières. Jeudi soir, Jean Castex a fixé la fin des jauges, du télétravail et du masque en extérieur pour le 2 février. Trop tôt ? C’est que les courbes épidémiologiques n’évoluent pas comme prévu. L’exemple anglaislaissait espérer un pic suivi d’un affaissement. Outre-Manche, l’incidence a été divisée par deux en quinze jours. Las, dans l’Hexagone, on a observé cette semaine un rebond du nombre de cas qui laisse perplexes les scientifiques.
Des contaminations à l’école
Le Conseil scientifique, dont Arnaud Fontanet est membre, écrivait dans son avis du 19 janvier que «la reprise épidémique observée mi-janvier 2022 est probablement multifactorielle, en partie liée à une circulation très active du virus dans les écoles primaires, les maternelles, et les crèches». Dans un message oscillant entre espoir et appel à la patience, il estime que le système de soins va rester sous tension jusqu’à mi-mars, mais que «le retentissement sur le système de soins pourrait être géré si, et seulement si, la réduction des contacts et la conservation des gestes barrières se poursuivent durant les semaines qui viennent».
Ce début de semaine a aussi été marqué par la médiatisation d’un nouveau variant qui pourrait être responsable du rebond. Baptisé BA.2, il est un cousin d’omicron (BA.1). Ce variant, identifié dans quarante pays, est particulièrement présent au Danemark. En dix jours, il est passé d’une fréquence de 2% des séquençages à la moitié des séquençages. En France, moins d’une vingtaine de BA.2 ont été séquencés, mais le pays connaît la même reprise du nombre de cas que le royaume nordique.
28 000 patients hospitalisés
Clairement, le nombre de cas n’est plus l’indicateur que le gouvernement regarde pour prendre ses décisions. Avec une incidence à plus de 3 200, les anciens seuils d’alerte de 50 ou 200 sont dépassés et oubliés. Le nombre de décès dus au Covid n’est plus un sujet non plus. Plus de 1 400 morts par semaine, soit plus de 200 par jour, quand le premier confinement avait été déclenché avec un total de moins de 200 morts.
Le nombre de personnes hospitalisées continue d’augmenter pour atteindre près de 28 000 patients tandis que le nombre de personnes en réanimation, lui, diminue mais stagne autour de 3 800. Le variant omicron semble engendrer moins de cas gravesnécessitant une admission en soin critique mais plus d’hospitalisations conventionnelles, a priori de courte durée.
En l’état, envisager la levée des restrictions relève donc du vœu pieu. Dans son avis rendu public jeudi, le Conseil scientifique met en garde contre «l’ambiance générale parfaitement compréhensible»consistant à «penser qu’on sera au début de la fin en mars-avril». Il rappelle que «l’arrivée d’un nouveau variant était difficile, voire très difficile à anticiper». Bref, il est trop tôt pour abaisser la vigilance.
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