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jeudi 9 janvier 2020

Bioéthique : les sénateurs refusent le remboursement de l'AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, et vont plus loin pour la génétique

PAR 
COLINE GARRÉ -  
PUBLIÉ LE 09/01/2020

Crédit photo : S. Toubon
Les sénateurs réunis en commission ont adopté le projet de loi de bioéthique ce mercredi 8 janvier en apportant de substantielles modifications au texte issu de l'Assemblée nationale, via l'adoption de 136 amendements.
Cette nouvelle version sera examinée en séance publique au Sénat à partir du 21 janvier ; le vote final est prévu le 4 février. L'Assemblée s'en saisira ensuite pour une seconde lecture.

Non-remboursement de l'AMP hors indications médicales 
Si les sénateurs en commission ont entériné l'ouverture de l'assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples de femmes et aux femmes seules, ils ont réintroduit le critère médical pour les couples hétérosexuels (infertilité médicalement diagnostiquée ou non transmission d'une maladie d'une particulière gravité). Ils restreignent la prise en charge de l'AMP par l'Assurance-maladie aux seules demandes fondées sur la base d'un critère médical, excluant ainsi du remboursement les femmes seules et homosexuelles. 
Double guichet pour l'accès aux origines 
En matière d'accès aux origines des enfants issus d'AMP, les sénateurs ont introduit une distinction entre données non identifiantes et identité du donneur. L'accès aux données non identifiantes devra être un préalable indispensable à tout don. En revanche, l'accès à l'identité du donneur devrait faire l'objet d'un consentement du donneur au moment de la demande de l'enfant à sa majorité. 
Les sénateurs permettent aux enfants issus d'AMP sous l'actuel régime de l'anonymat de se tourner vers le CNAOP (Conseil national d'accès aux origines personnelles, compétent pour les adoptés et les pupilles) pour qu'il recontacte le donneur, afin de lui demander s'il accepterait de dévoiler son identité (contre l'avis du gouvernement qui y voit la rupture d'un contrat moral). En revanche, ils suppriment la possibilité ouverte par l'Assemblée, pour le donneur, d'avoir des informations sur les enfants issus de son don.  
Suppression d'un plan d'actions contre l'infertilité
En matière d'autoconservation des gamètes, les sénateurs laissent aux équipes médicales l'appréciation des critères d'âge, alors que l'Assemblée demandait à ce qu'ils soient fixés réglementairement. Ils autorisent les centres de santé privés lucratifs à conserver les gamètes, alors que les députés avaient préféré (non sans débat) confier cette tâche au public et au privé non lucratif. Ils suppriment l'obligation de lancer un plan d'actions national sur l'infertilité, qui avait fait l'unanimité à l'Assemblée, au motif qu'elle n'a pas sa place dans une loi de bioéthique.
Les sénateurs renforcent l'interdiction de la gestation pour autrui (GPA) en excluant la transcription à l'état civil des actes de naissance établis à l'étranger, d'enfants issus de cette technique. Une mesure qui va à l'encontre des décisions judiciaires rendues fin 2019 par la Cour de cassation et la cour d'appel de Rennes, reconnaissant des filiations entières, sans que la mère d'intention ait à passer par l'adoption.  
Autorisation des tests récréatifs et du DPI-A
« Sur un certain nombre de sujets, on va plus loin que l'Assemblée », a défendu Olivier Henno, co-rapporteur du texte. Si le Sénat s'est montré restrictif en matière d'AMP, le constat du sénateur centriste semble davantage s'appliquer dans le champ de la génétique et génomique.  
La commission spéciale autorise la commercialisation de tests génétiques à visée généalogique (alors que l'Assemblée avait voté l'interdiction de leur publicité). En outre, elle ouvre la voie, à titre expérimental, à la prescription d’examens des caractéristiques génétiques en l’absence d’antécédent familial ou de contexte clinique justifiant la recherche d’une anomalie génétique prédéterminée (non remboursés par l'Assurance-maladie). 
Les sénateurs autorisent l'extension du diagnostic préimplantatoire à la recherche d'aneuploïdies, à titre expérimental. Les députés, à l'issue de longs débats, et suivant en cela l'avis du gouvernement, y avaient renoncé. Selon ses défenseurs, cette pratique devrait améliorer les chances de succès d'une fécondation in vitro ; mais sa généralisation est perçue comme lourde de dérives eugéniques par ses opposants, qui rappellent que l'association entre aneuploïdies et fausses couches reste encore à explorer. 
Rétablissement du « bébé médicament »
Les sénateurs ont aussi rétabli l'autorisation du DPI couplé à un typage HLA (DPI-HLA) connu sous le nom de « bébé médicament », à laquelle les députés avaient mis fin, en première lecture. 
Enfin, en matière de recherche, les sénateurs interdisent la possibilité (ouverte par l'Assemblée) d'introduire des cellules souches embryonnaires humaines dans des embryons animaux ; les chercheurs n'auront le droit de recourir qu'aux cellules IPs (comme c'est le cas actuellement). La commission sénatoriale fixe à 10 ans la durée de conservation des embryons donnés à la recherche (contre 5 ans prévus par l'Assemblée). 

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