Paris, le mercredi 27 juin 2018 – L’année 2017 avait battu un record. Il pourrait être largement dépassé en 2018. Il suffit de taper dans le moteur de recherche de Google Actualités les mots « hôpital grève » pour que des dizaines d’articles, souvent datés du jour même ou de la veille, égrènent les difficultés rencontrées par les équipes hospitalières de la France entière. Ainsi, le nombre de mouvements sociaux qui avait déjà atteint un niveau historiquement élevé en 2017 pourrait connaître un nouveau pic cette année.
Rouvray-Pierre Janet : même combat
Quelques jours après une grève de la faim très médiatisée à l’hôpital psychiatrique du Rouvray destinée à dénoncer notamment un effectif trop réduit, non loin de là au Havre, les personnels de l’établissement psychiatrique Pierre Janet se sont mobilisés. Les praticiens et infirmières qui participent côte à côte à la grève paraissent proches de l’épuisement. Ils racontent les patients dormant sur des matelas installés sur des chaises ou à même le sol dans l’unité des urgences, le manque de tables pour servir convenablement les repas et l’impuissance des soignants pour répondre aux demandes des malades. Lors des réunions collectives, certains pleurent quand ils témoignent de leur quotidien. Beaucoup manifestent leur colère face à un "bricolage" constant pour assurer ce qui ne peut être considéré que comme le minimum.
Des difficultés et un constat unanimes
Si la psychiatrie apparaît particulièrement vulnérable et si certaines régions comme la Normandie semblent connaître des difficultés plus marquées, tous les établissements et toutes les localités souffrent de difficultés du même ordre. A Toulouse, Vierzon ou encore Brest, dans les blocs opératoires ou les maternités, les mêmes mots d’ordre, les mêmes slogans concentrés le plus souvent sur la dégradation de l’accueil des patients tentent de créer un électrochoc pour les autorités locales.
Quand ils ne manifestent pas ou ne collent pas un brassard sur leur blouse pour manifester leur inquiétude, les soignants écrivent. Ils adressent des missives de plainte à leurs élus, au ministre de la Santé, au premier ministre ou ils publient des livres de témoignages et d’enquêtes.
Agnès Buzyn a confirmé que la mobilisation était soutenue. Évoquant une lettre récemment adressée par 175 médecins à Édouard Philippe signalant l’essoufflement de l’hôpital public, elle a précisé, interrogée par France Info, avoir reçu ces dernières semaines de nombreuses lettres similaires : « Quelque part, tout le monde fait actuellement le même constat: le système de santé est en difficulté » a-t-elle observé.
Appel officieux à la Réserve sanitaire
Quand ils ne manifestent pas et n’écrivent pas, les professionnels de santé comptent. Se recomptent. A l’approche de l’été. La période estivale est en effet de plus en plus souvent critique dans les services d’urgence de petite et aujourd’hui de moyenne taille. Dans Ouest France, le président de Samu Urgences de France, François Braun remarquait récemment : « C’est en train de craqueler un petit peu partout. Les soucis commencent avant même la période estivale, on l’avait remarqué ces dernières années dans de petits services, maintenant ça en touche de plus gros ». Ainsi, avant même la période estivale, des services d’urgence s’interrogent sur leur capacité de fonctionnement quand les congés les priveront d’un certain nombre de leurs médecins permanents ou temporaires. Avant même la période estivale, des unités ont dû réduire leurs horaires d’ouverture ou faire appel officieusement à la réserve sanitaire, pourtant destinée normalement à palier des situations exceptionnelles et catastrophiques.
Il est plus tard que tu le penses
L’été promet donc d’être difficile pour l’ensemble des personnels hospitaliers. Seront-ils consolés de leurs inquiétudes par le plan de réforme de l’hôpital qui doit être dévoilé dans les semaines qui viennent ? Concernant ce programme, le ministre de la Santé a indiqué hier : « J'arrive avec une réforme en profondeur du système de santé pour répondre aux difficultés. J'arrive un peu tard mais on va le faire » a-t-elle assuré avant d’ajouter : « Le système est déjà en très forte tension (…). Je regrette qu'un certain nombre de réformes n'aient pas été mises en place plus tôt ».
Reste donc à savoir si pour l’hôpital public, il est déjà trop tard.
Aurélie Haroche
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire