Crédit Photo : S. Toubon
Les médecins de terrain veulent à tout prix rencontrer Agnès Buzyn. Le ton monte d’un cran dans les rangs de plusieurs syndicats hospitaliers, dont une cinquantaine de représentants se sont réunis samedi dernier au Sénat. Mi-septembre, les urgentistes de l'AMUF, les praticiens d'Avenir hospitalier et du SNPHAR-E, la branche médecins de Force ouvrière, trois organisations de psychiatres (SPH, USP et SPEP) et plusieurs médecins d'Auvergne-Rhône-Alpes envoyaient une lettre ouverte à Agnès Buzyn. Ils y évoquaient la dégradation du service public hospitalier, de l’accès au soin et des conditions d’exercice du métier. Cinq mois après ce cri de colère signé par 400 professionnels, la pétition a recueilli 1 200 signatures. Les médecins hospitaliers réclament désormais un moratoire pur et simple sur les fermetures de lits, de services, d'hôpitaux ainsi que l’arrêt des réorganisations dans le cadre des groupements hospitaliers de territoire.
« Aujourd’hui il n’y a plus un seul service d’urgences qui ne soit pas en grève à Lyon. Les débrayages démarrent à Bordeaux, Lille ou Toulouse. Agnès Buzyn le sait depuis longtemps, mais le message d’alerte que nous lui avons adressé il y a cinq mois est resté lettre morte », déplore un urgentiste venu d’Isère pour crier son indignation. « Nous voulons marquer un stop à la stratégie nationale de santé, à ce nouveau plan d’austérité dévoilé il y a quelques jours par le Premier ministre et la ministre de la Santé », lance le Dr Cyrille Venet, anesthésiste-réanimateur à Voiron (Isère) et délégué FO.
À ses côtés, le Dr Bruno Caron, psychiatre à Saint-Égrève (Isère), souligne les démissions en chaîne et les fermetures accélérées d’établissements. « On arrive dans une zone critique, les burn-out se multiplient, les départs en libéral ne se comptent plus. La qualité de l’exercice médical n’est plus une question à se poser, nous sommes en position de survie et voyons disparaître peu à peu les moyens de base pour exercer. Comment peut-on se contenter de cocher des cases en étant satisfait qu’un médecin soit présent à tel et tel endroit sans s’assurer que les moyens sont réunis pour lui permettre de faire simplement son métier », s’emporte-t-il.
Des démissions de médecins à la pelle
« On ne demande pas la lune, on veut simplement un moratoire pour stopper le processus de fermeture de lits, qui reste la baguette magique des plans d’économie », s’insurge un autre collègue.
Le Dr Christophe Prudhomme, urgentiste à Bobigny (Seine-Saint-Denis) et porte-parole de l'AMUF, estime pour sa part que la fermeture de 120 000 lits ces 20 dernières années n’a pas permis de redresser la situation financière des hôpitaux, la rendant simplement intenable. « Une dame de 88 ans a été poussée hors des urgences sans ses chaussures, à Saint-Malo, la semaine dernière. Toutes les nuits, entre 200 et 300 personnes âgées dorment sur des brancards dans les couloirs des urgences. Mais où va-t-on ? », poursuit le médecin scandalisé, qui explique ne plus avoir assez de doigts pour comptabiliser les démissions de chefs de pôle ou présidents de CME.
Les signataires attendent avec impatience le 15 et 22 mars, dates à laquelle les soignants en EHPADet les fonctionnaires ont promis quelques réjouissances sur tout le territoire au gouvernement. Les médecins hospitaliers le prédisent : Agnès Buzyn pourrait bien avoir pas mal de monde sous ses fenêtres si, d'ici là, elle ne fait pas le choix du dialogue.
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