Comment choisir le bon antipsychotique devant un premier épisode psychotique ? La connaissance fine des neurotransmetteurs peut guider le choix du traitement, mais la symptomatologie n’oriente pas toujours vers telle ou telle molécule. L’evidence based medicine nous aide dans le choix de l’antipsychotique, avec des essais contrôlés randomisés, et des méta-analyses d’essais, qui utilisent comme gold-standard l’intensité des symptômes après (généralement) 6 semaines de traitement.
Seulement, dans la « vraie vie », les patients ne sont pas toujours les mêmes que dans les essais, et il vaut mieux savoir raisonner à plus long terme qu’à 6 semaines. C’est pourquoi des chercheurs finlandais ont conduit une large étude de cohorte pour tenter de répondre à cette question simple : quel est l’antipsychotique qui permet le mieux d’éviter les ré-hospitalisations ?
Un palmarès mené par les traitements injectables et la clozapine
Dans cette étude, ont étés évalués 62 250 patients hospitalisés avec un diagnostic de schizophrénie entre 1972 et 2014 (cohorte de prévalence) et 8 719 patients hospitalisés pour la première fois pour schizophrénie (cohorte d’incidence) entre 1996 et 2014 et naïfs de tout traitement antipsychotique durant l’année précédant l’hospitalisation. Les patients ont été suivis jusqu’à la fin 2015. Ils étaient leur propre contrôle (dans les périodes où ils ne recevaient pas d’antipsychotique).
La durée médiane de suivi est de 14,1 ans dans la cohorte de prévalence et de 10,1 pour la cohorte d’incidence. D’une manière générale, l’étude met en avant la supériorité des antipsychotiques injectables de longue durée d’action. En effet, le Hazard Ratio de ré-hospitalisation sous antipsychotique de longue durée d’action de première génération (type Haldol decanoas) est de 0,46 (intervalle de confiance à 95 % [IC95] = 0,40 à 0,54) ; sous antipsychotique de longue durée d’action de seconde génération (type Risperdal consta) de 0,45 (IC95 = 0,39 à 0,52) ; sous antipsychotique oral de première génération de 0,67 (IC95 = 0,60 à 0,74) ; sous antipsychotique oral de seconde génération de 0,57 (IC95 = 0,53 à 0,61).
L’olanzapine injectable en tête de classement
En considérant les différentes traitements pris séparément, c’est l’olanzapine en forme injectable qui remporte la palme, avec le plus faible risque de réhospitalisation (HR = 0,46, IC95 = 0,36 à 0,61), talonné par la clozapine (HR = 0,51, IC95 = 0,49 à 0,53) dans la cohorte de prévalence, en comparaison à l’absence de traitement. Dans la cohorte d’incidence, on retrouve en tête (et c’est une surprise) le flupentixol injectable, relativement peu utilisé en France (HR = 0,24 ; IC95 = 0,12 à 0,49) ainsi que l’olanzapine injectable (HR = 0,26 ; IC95 = 0,16 à 0,44). Citons parmi les mauvais élèves l’haloperidol par voie orale, ou encore la quetiapine orale.
Cette étude met principalement en avant deux données : la supériorité de la forme injectable par rapport à la forme orale et l’efficacité non seulement de l’olanzapine mais aussi de la clozapine. Or les recommandations françaises et internationales placent la clozapine en troisième intention après échecs de deux antipsychotiques pris pendant une durée de 6 semaines. Notons que le risque de réhospitalisation toute cause confondue était également diminué par la clozapine dans cette étude, montrant que les hospitalisations provoquées par les effets indésirables graves n’étaient pas à même de surpasser les bénéfices en termes de prévention de la rechute.
Ne pas associer inobservance et traitement injectable !
Les recommandations françaises et internationales ne considèrent l’indication d’un traitement injectable qu’uniquement en cas de rechute pour des patients dont on peut penser qu’il y a un risque d’inobservance. Ce type d’étude, s’ajoutant d’ailleurs à d’autres, doivent conduire à envisager une telle prescription dès le premier épisode psychotique. Les traitements injectables de longue durée d’action ne devraient pas être destinés uniquement à pallier une mauvaise observance (qu’elles ne permettent du reste pas totalement d’éviter).
Dr Alexandre Haroche
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire