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lundi 19 février 2018

L'hôpital de Meulan est condamné au civil après l'hospitalisation irrégulière d'un mineur en psychiatrie


Le CHI de Meulan-Les Mureaux (Yvelines) est condamné à indemniser un homme qui y avait été hospitalisé en psychiatrie en 1999 lorsqu'il était âgé de neuf ans. Cette hospitalisation avait été jugée irrégulière en 2016 par le juge administratif car l'admission n'avait pas été dûment autorisée par les parents de l'enfant.

Le tribunal de grande instance (TGI) de Versailles (Yvelines) a condamné le 23 janvier le CHI de Meulan-Les Mureaux à verser à un homme 10 000 euros (€) d'indemnisation en réparation du préjudice résultant de la privation de liberté et 4 000 € en réparation du préjudice lié à l'administration de traitements sous la contrainte. Ceci dans le cadre d'un séjour hospitalier d'un mois effectué en psychiatrie dans l'établissement lorsque ce dernier avait neuf ans. Devenu majeur, l'intéressé a saisi dans un premier temps le tribunal administratif (TA), qui a jugé en 2016 cette hospitalisation "irrégulière" (décision ci-contre), au motif notamment que l'admission en urgence en service psychiatrique de cet enfant, mineur à l'époque des faits, s'est effectuée sans le consentement préalable de ses parents. Le requérant a notamment soutenu s'être opposé à la mesure d'hospitalisation dont il faisait l'objet et que ses parents ne l'ont jamais sollicitée et n'y ont jamais consenti. Et le fait que son père lui ait rendu visite au cours de l'hospitalisation ne signifie pas qu'il y ait donné son consentement, a-t-il argué.

Pas d'accord parental préalable à l'admission


L'hospitalisation litigieuse remonte à janvier 1999. X., un enfant de neuf ans, est confié depuis juillet 1998 au service d'aide sociale à l'enfance (ASE) du département des Yvelines et placé dans un foyer d'accueil pour enfants. À la suite d'une "grave crise de violence", rappelle le TA, il est hospitalisé en urgence au CH de Mantes-la-Jolie, à l'initiative du directeur du foyer dans lequel il était placé. Puis, l'enfant est transféré le lendemain dans l'unité d'accueil d'urgence pour adolescent du CHI de Meulan-Les Mureaux. Le pédopsychiatre de service du CHI décide après examen de le maintenir en milieu médical dans le service. Le père de l'enfant ne signera cependant que sept jours plus tard une attestation d'urgence médicale autorisant le directeur de l'hôpital à prendre "toute mesure utile que pourrait nécessiter l'état de santé de son fils". Cependant, rappelle le TA, l'admission d'un mineur relevant du service de l'ASE est prononcée à la demande de ce service, sauf si le mineur lui a été confié par une personne exerçant l'autorité parentale. Toutefois, l'admission peut être demandée par le service si l'autorité parentale "ne peut être jointe en temps utile". 

"L'admission paun établissement de santé d'un mineur hospitalisé n'a pas pour effet de transférer à cet établissement la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur pendant la durée de sa prise en charge" 

Tribunal administratif de Versailles

L'hôpital soutient que les parents ont été "autant que possible associés" à la décision d'hospitalisation de leur enfant mineur et à sa prise en charge hospitalière, signale la décision. Mais "cette circonstance, à la supposer établie, n'établit aucunement l'accord des parents donné à l'hospitalisation de leur enfant", a estimé le juge administratif. Même la mention dans le dossier médical indiquant que le père "s'est montré très présent auprès de X. pendant son hospitalisation" ne saurait "davantage être interprétée comme un consentement délivré par celui-ci à l'hospitalisation". Enfin, l'établissement hospitalier "ne saurait utilement invoquer [...] le code Civil en ce que le placement d'un enfant de neuf ans en unité psychiatrique ne peut être considéré comme un acte usuel de l'autorité parentale". Le TA a conclu que X. était donc fondé à soutenir que son admission, effectuée sans le consentement préalable de ses parents, a été irrégulière et à demander l'annulation de la décision. Il faut également en déduire, a précisé le juge, que "l'admission par un établissement de santé d'un mineur hospitalisé n'a pas pour effet de transférer à cet établissement la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur pendant la durée de sa prise en charge".

Les garanties des mineurs en question


Dans son jugement du 23 janvier, le TGI a estimé que le préjudice résultant de la privation de liberté de ce mineur "était incontestable", sans entrer dans les détails, de même que pour le préjudice d'administration de traitements sous la contrainte. Il a aussi mis à la charge du CHI la prise en charge des frais de justice du requérant à hauteur de 3 500 €.

Cette décision, notamment diffusée par le Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie (CRPA), fait écho, selon l'association, au nécessaire respect des droits fondamentaux des mineurs hospitalisés en milieu psychiatrique, comme le rappelle un récent rapport thématique du contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL). Dans ce rapport publié en novembre dernier (lire notre article), le contrôleur insiste en effet sur le fait que les mineurs hospitalisés en psychiatrie sont particulièrement vulnérables et qu'ils ne bénéficient pas, à l'heure actuelle, des mêmes garanties que les majeurs en situation comparable.
Caroline Cordier

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