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mardi 12 juillet 2022

Le droit fondamental à la protection de la santé n’est plus garanti en France

par Un ensemble de collectifs et d'associations  publié le 12 juillet 2022

Un groupe d’associations et de collectifs de santé interpelle la Première ministre et menace pour la première fois de porter plainte pour carence fautive de l’Etat, tant la situation de l’hôpital public est dégradée. Les signataires appellent notamment à la fixation de ratios minimum soignants-soignés dans tous les services.

Le 22 juin, les maires de France s’alarmaient des fermetures de services hospitaliers car partout en France l’accès à l’hôpital public se réduit, alors que les conditions de travail des agents hospitaliers deviennent plus dures, accélérant leur fuite et donc augmentant les fermetures de lits par pénurie de personnel. En mars dernier, le Sénat relevait : «Vétusté des équipements, charge de travail excessive, manque de temps médical et soignant auprès des patients qui sont autant de facteurs à l’origine d’un profond sentiment de perte de sens qui provoque des départs de personnels en cours de carrière.» La situation est maintenant si dégradée que des préjudices directs sont avérés pour les patients, mais aussi pour les agents hospitaliers : perte de sens, épuisement professionnel, fuite des titulaires et perte d’attractivité pour les professionnels nouvellement diplômés. La «mission flash» du nouveau ministre n’a eu pour objet que les services d’urgence ignorant la dégradation de l’intégralité du système hospitalier.

Des droits qui ne sont plus garantis

D’après le code de la santé publique, il est de la responsabilité du gouvernement (article L 1411-1) de mener une politique de santé garantissant le droit fondamental à la protection de la santé au bénéfice de toute personne. Cette politique doit garantir le droit du patient et des soignants à la santé, le droit au respect de la dignité de la personne malade, le droit de recevoir les traitements les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques garantissant la meilleure sécurité sanitaire, le principe de continuité du service public hospitalier. Force est de constater que ces droits ne sont plus garantis.

Ainsi la littérature scientifique en matière de nombre de «patients par soignant» est unanime : plus il y a d’infirmières, moins il y a de patients par soignant, plus la chance de survie des patients est accrue. La présidente de la Haute Autorité de santé (HAS) le confirmait lors de son audition au Sénat «il existe un lien établi – par une littérature de très bon niveau – entre le niveau de personnes d’un établissement ou d’un service et la qualité des soins». En d’autres termes, l’objectif du droit à la santé et l’obligation de bénéficier des soins les plus appropriés ne sont remplis qu’à la condition que des ratios de sécurité et de qualité soient respectés.

Pourtant, en dépit de la littérature et de nombreuses alertes, l’Etat n’a jamais défini de ratios soignants-soignés hors domaines très restreints (dialyse, soins intensifs, néonatologie et réanimation). La sénatrice Catherine Deroche signalait au cours de la commission d’enquête sénatoriale, le 29 mars 2022, qu’aucun véritable suivi du ministère de la Santé n’est effectué en matière de pilotage de la politique hospitalière, sur des questions aussi importantes que les ressources humaines et les capacités d’hospitalisation.

Par ailleurs, comme le souligne le rapport du Sénat, la politique qu’a menée l’Etat en matière de financement hospitalier a «mis les établissements en difficulté». Dès lors, le principal poste de dépenses des hôpitaux, celui des dépenses de personnels, a été soumis à une gestion dégradant les conditions de travail et les investissements n’ont souvent pu être opérés que grâce à l’endettement.

Des effectifs inadéquats, la pénibilité accrue au travail, le manque de soignants, l’absence de ratios de sécurité définis, la fermeture de nombreux services d’urgence et de services d’hospitalisation, partiellement ou complètement, un financement décorrélé des besoins, une construction annuelle du budget des hôpitaux ne tenant pas compte des besoins documentés et des tendanciels avérés, des investissements hospitaliers non financés, l’absence de dialogue avec les élus territoriaux, représentants des usagers, représentants des personnels médicaux ou paramédicaux, signent les défaillances des politiques de santé dont l’Etat est responsable. Le comportement fautif de l’Etat et les préjudices causés à l’hôpital, aux patients et aux soignants sont avérés et perdurent.

C’est pourquoi les associations et collectifs que nous représentons enjoignent, par l’intermédiaire de leurs avocats maîtres Macouillard et Melin, la Première ministre à :

- Mettre sans délai un terme à l’ensemble des carences qui continuent d’engager la responsabilité de l’Etat ;

- Prendre des décisions réglementaires en urgence afin de définir des ratios d’effectif «patients par soignant» suffisants au regard des études internationales en la matière ;

- Renforcer significativement le nombre d’infirmiers et d’aides-soignants et en définissant des seuils critiques ajustés sur les activités des établissements ;

- Mettre en place un mécanisme d’alerte lorsque les seuils critiques susvisés sont atteints.

En l’absence de réponse et de réparations des préjudices causés, les associations et collectifs signataires porteront plainte pour carence fautive contre l’Etat.

Signataires : Marc De Kerdanet Pour Aide aux jeunes diabètiques (AJD), Stéphanie Fugain Pour l’Association Laurette-Fugain,Laure Dorey Pour l’Association maladies, foie, enfants (Amfe), Marie Citrini et Stéphane Dauger Pour le Collectif Inter-Hôpitaux (CIH), Pierre Schwob Pour le Collectif Inter-Urgences, Michèle Leflon Pour la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité, Maîtres Macouillard et Melin Du cabinet Topaloff.


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