par Estelle Aubin publié le 30 mai 2022
Encore un chiffre alarmant venu du monde hospitalier. Le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, Martin Hirsch, affirme qu’il manquerait à l’appel 1 400 infirmiers et infirmières dans les hôpitaux franciliens. «On a 1 000 infirmiers de moins qu’il y a un an à la même époque. On avait initialement prévu de créer 400 postes supplémentaires, on n’a pas pu les ouvrir. Il nous manque donc 1 400 infirmières par rapport à ce que l’on aimerait avoir», a ainsi détaillé Martin Hirsch sur France Inter, lundi 30 mai.
L’une des raisons ? L’ombre du Covid-19 semble encore planer. Depuis plusieurs années et d’autant plus depuis le début de la pandémie, certains infirmiers ont «changé de métier», «d’autres sont partis dans le privé» ou «en province», d’autres encore «ne sont pas venus travailler après leur diplomation de l’été dernier», précise-t-il.
De plus en plus d’intérimaires ou «mercenaires»
Autre facteur avancé par Martin Hirsch : le recours de plus en plus fréquent aux contrats intérimaires. «Beaucoup de personnels utilisent cette drogue douce de l’intérim, qui nous met dans une situation absolument terrible», déplore-t-il. Il qualifie même ces «intérimaires» de «mercenaires» car ils peuvent toucher le pactole de 1 500 euros pour une garde de week-end, contre 300 maximum pour un médecin expérimenté. Et précise : «Avant, quand on était diplômé, on n’avait pas le droit de s’installer comme intérimaire. Ce statut, cela veut dire : “Je fais le choix de travailler quand je veux, quand je peux, payé trois fois plus que les autres”.»
Conséquence de cette hémorragie de personnel : en moyenne, 15 % de lits restent fermés à l’AP-HP. Les services de maternité, les urgences, les unités de pointe craquent de toutes parts. Comme les blocs neurovasculaires, dédiés à la prise en charge rapide des victimes d’AVC. Avec un tiers de lits fermés au sein de l’AP-HP et un sous-effectif chronique, des patients sont refusés chaque jour.
La santé, «urgence» du gouvernement Borne
Les infirmiers ne manquent pas d’appeler à l’aide. Nombreux sont ceux qui descendent dans la rue pour dénoncer leurs conditions de travail, comme le 7 avril, à quelques jours du premier tour de la présidentielle. Ces derniers jours, les hôpitaux de France ont même alerté sur la pénurie de personnel pour l’été. Leur crainte : que les services d’urgences ne puissent accueillir tous les malades. Constat partagé par Martin Hirsch : «Tout le monde s’inquiète pour l’été, la situation est très sévère.»
Pour résoudre le problème, il propose aux aides-soignants des formations pour devenir infirmiers et aux futurs élèves infirmiers «un contrat où on leur paie leur dernière année contre un engagement de servir pendant dix-huit mois» dans l’antre de l’AP-HP. Pour l’heure, 650 d’entre eux – sur les 1 000 diplômés à la fin de l’été – ont signé le contrat.
Dans ce contexte, la santé a été érigée comme l’une des trois «urgences» auxquelles le gouvernement doit s’atteler, au côté du climat et du pouvoir d’achat, a indiqué ce vendredi la Première ministre, Elisabeth Borne. Elle a assuré à l’issue d’une réunion avec son gouvernement avoir demandé aux «ministres concernés» de lui «faire des propositions très rapidement pour prendre des mesures efficaces pour l’été».
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