Martin Gauthier
Les difficultés s’accumulent pour l’industrie du cannabis au Canada. Faibles bénéfices, pertes de profits, demande stagnante, saturation du marché : le secteur ferme des installations et se cherche désespérément une porte de sortie.
Les nouvelles pourraient, à première vue, paraître encourageantes pour l’industrie canadienne du cannabis. Selon le Financial Post, son marché a plus que doublé entre 2019 et 2020, et ses produits se sont diversifiés, au point que “le Canada est maintenant le plus grand exportateur de cannabis légal au monde, devant les Pays-Bas”.
Mais en réalité, le secteur est confronté à de nombreux défis. La réglementation demeure un fardeau pour l’industrie, souligne le quotidien, alors que les marchés étrangers s’ouvrent au cannabis : “Le Canada fait partie de la Convention unique sur les stupéfiants des Nations unies de 1961, qui considère le cannabis comme une drogue nocive et limite les importations et les exportations internationales à des fins scientifiques et médicinales.”
D’autre part, le cannabis est le seul produit médical à être soumis au Canada à une taxe d’accise, c’est-à-dire établie sur la quantité du produit vendu et non sur sa valeur, précise au journal Brad Poulos, spécialiste du marché du cannabis de l’Université métropolitaine de Toronto.
Troisièmement, les acteurs sont très nombreux. En octobre 2021, selon Bloomberg, le pays comptait 776 producteurs de cannabis desservant 4,4 millions de consommateurs canadiens. Pas étonnant que le plus important d’entre eux, Tilray, qualifie ce marché de “sursaturé”.
Alors que les prix des autres biens de consommation, notamment alimentaires, sont à la hausse au Canada, le Globe and Mail explique que la situation est différente pour le secteur :
“Les producteurs et les détaillants de marijuana, aux prises avec d’importants stocks, ont réduit les prix de leurs produits pour engranger des revenus et se battre pour des parts de marché.”
Stocks excédentaires
Devant la situation, Canopy Growth a sonné la charge des compressions fin avril en annonçant le licenciement de 243 employés. Le 12 mai, Aurora Cannabis a annoncé la fermeture de trois de ses installations, après avoir affiché une perte de quelque 730 millions d’euros lors du dernier trimestre. Une période alourdie, note le Toronto Star, par des “stocks excédentaires, des produits plus anciens et une concurrence féroce”.
En fait, écrit encore le Globe and Mail, “certaines des plus grandes entreprises de cannabis au Canada ont passé une grande partie des deux dernières années à réduire et à consolider leurs opérations”, supprimant ainsi “des milliers d’emplois depuis le pic d’embauche, en 2019”.
Les principales victimes de la situation sont les travailleurs temporaires étrangers, ajoute le journal :
“Ils risquent de perdre des avantages tels que l’accès aux soins de santé et la capacité de travailler au Canada s’ils ne peuvent pas trouver un autre employeur disposé à les parrainer avec le même permis.”
Le marché américain, la Terre promise ?
Alors que la légalisation de l’usage de la marijuana gagne du terrain dans les États américains et que la Chambre des représentants a déjà adopté un projet de loi décriminalisant la substance, les États-Unis pourraient représenter un nouveau marché qui permettrait au Canada de sauver la mise. Le président du Conseil du cannabis canadien, Rick Savone, a déclaré au Financial Post :
“Il est temps que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux du Canada soutiennent notre secteur pour qu’il se prépare à cette opportunité économique et concurrentielle.”
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