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mardi 19 avril 2022

Est-ce Marine Le Pen ou Michel Onfray qui a changé ?

par Simon Blin  publié le 19 avril 2022

Vingt ans après le lancement de son Université populaire pour «lutter contre les idées du FN», suite à l’accession au second tour de Jean-Marie Le Pen, le philosophe a estimé sur RMC que la candidate du RN n’était «pas d’extrême droite».

«Ça me paraît évident que Marine Le Pen n’est pas d’extrême droite.»Après l’historien et philosophe Marcel Gauchet, c’est au tour de Michel Onfray de banaliser la candidature de la leader du Rassemblement national (RN), à cinq jours du second tour et à la veille du débat de l’entre-deux-tours. «Je trouve ça étonnant qu’on puisse faire porter les péchés du père sur la filleTous les partis ont changé, a déclaré le philosophe et polémiste sur l’antenne de RMC[…] Je lis les programmes, j’écoute ce que les gens disent et je regarde ce qu’ils font […] Faisons de l’histoire, pas de la propagande.»

Histoire et programme, allons-y. Il se trouve que la mesure phare du programme de Marine Le Pen s’appelle la «préférence nationale». On n’a cessé de l’écrire et de l’analyser dans Libération : il s’agit d’un concept issu de la pensée nationaliste la plus pure, déjà présent dans le programme du Front national, qui consiste à privilégier les «nationaux» aux étrangers et donc à établir une différence de traitement entre les citoyens selon leur identité. Certes, Marine Le Pen n’est pas son père mais la nature de son projet politique continue de cocher les fondamentaux historiques du lepénisme. Est-ce alors l’extrême droite qui a changé ou Michel Onfray ?

Bingo de la pensée ultra-réactionnaire

Personne ne tombera de sa chaise. Ces dernières années, le pamphlétaire nous avait habitués à ce genre de glissement idéologique, tout occupé à dénoncer avec virulence le «politiquement correct», le «wokisme», l’«islamo-gauchisme», la «tyrannie des minorités», les nouvelles féministes, l’Europe, le cosmopolitisme, l’islam ou les médias mainstream dont il se dit ostracisé tout en y étant continuellement invité. Chacune de ses sorties médiatiques en une de Valeurs actuelles ou d’Elément, la revue d’extrême droite d’Alain de Benoist, dans le FigaroVoxCauseur ou sur CNews, s’apparente au fil des ans à un bingo de la pensée ultra-réactionnaire n’ayant rien à envier à Eric Zemmour.

En 2020, le lancement de sa revue Front populaire, média d’opinion à la coloration identitaire et censé réunir les «souverainistes de droite et de gauche», avait marqué un nouveau tournant dans la carrière de l’essayiste à la rhétorique vindicative. A l’époque, les représentants des droites les plus radicales ne s’y étaient d’ailleurs pas trompés. Alain de Benoist avait salué «une initiative excellente»dans le Monde. Philippe Vardon, membre du bureau national du RN et ancien du Bloc identitaire, avait jugé l’entreprise «intéressante». Tout comme Marine Le Pen qui s’était félicitée dans un tweet d’une «initiative […] positive».


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