26 octobre 2019
Alexandre Kha
Nouvelle direction encore en septembre, avec la parution de Cité irréelle, premier livre de l’Américain D. J. Bryant sorti outre-Atlantique en 2017. Il n’est plus question ici de pédagogie ni même d’histoire, mais de jeux sur les apparences et de troubles - nous ne nous en éloignons pas ! - psychologiques voire psychiatriques. Rassemblant cinq récits assez courts, Cité irréelle met en scène des personnages dont le rapport à l’identité, à la sexualité ou à la société tangue quelque peu.
Rêve ou schizophrénie ? L’auteur ne nous permet pas de trancher. Au contraire, il multiplie les pièges, narratifs et visuels, pour mieux nous faire approcher le gouffre au bord duquel ses personnages se promènent. Il ose ainsi des récits dont la temporalité est malmenée et dont les paradoxes sont dignes des meilleures nouvelles de science-fiction. Pour autant, ses dispositifs servent avant tout la caractérisation de ses personnages, leur conférant ainsi une densité éloignée des clichés qu’ils semblent être au départ.
Le dessin participe pleinement du malaise créé par la lecture de cette bande dessinée. Là aussi, la simplicité n’est qu’apparente. Elle masque une véritable recherche et l’assimilation de différentes influences, de Daniel Clowes aux productions Hanna-Barbera. Le dessinateur devra d’ailleurs peut-être s’en affranchir davantage pour suivre une voie qui lui soit encore plus personnelle.
Les trois ouvrages édités par Tanibis cette année sont d’une grande variété graphique comme thématique. Incohérence ? Sûrement pas. Alexandre Kha est un habitué de la maison, avec laquelle il avait auparavant publié cinq livres. D. J. Bryant se place dans la lignée de Paul Kirchner, partageant son goût pour la déstructuration et les personnages en limite. Au-delà du trouble évoqué ou provoqué par chacun de ces ouvrages, Tanibis se distingue donc par sa fidélité envers ses auteurs, et par une vision de l’édition privilégiant la recherche et la prise de risque au succès commercial facile.
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