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vendredi 30 mars 2018

Risque suicidaire de l’adolescent : la thérapie familiale pas supérieure aux traitements habituels, mais utile quand même

Univadis
de Agnès Lara   1 mars 2018

À retenir
L’instauration d’une thérapie familiale chez les adolescents ayant déjà réalisé 2 tentatives de suicide (TS) ne modifie pas le nombre d’hospitalisations pour récidive de TS sur une période d’observation de 18 mois. Elle n’apparaît supérieure ni en termes cliniques, ni en termes de coût/efficacité. Cependant, les résultats sur l’échelle SDQ indiquent une amélioration des troubles émotionnels et comportementaux, ainsi qu’une réduction plus rapide des idéations suicidaires, suggérant un effet positif sur la santé mentale. De nouvelles études sont attendues pour identifier les interventions les plus efficaces selon le profil des patients suicidaires (mauvais fonctionnement familial, difficulté à exprimer ses émotions, etc.).

Pourquoi est-ce important ?
Les tentatives de suicide (TS) sont fréquentes chez les adolescents et elles sont souvent suivies de récidives (18%). Les facteurs familiaux tels que les relations parents-enfants, la capacité à exprimer ses émotions, des conflits parentaux, des abus sexuels, etc. constituent des facteurs de risque importants. Et les thérapies familiales visent à mobiliser les ressources des parents comme des enfants pour y faire face. Cependant les interventions ayant pour objectif de réduire ces gestes ont été peu évaluées jusqu’ici.
Thérapie familiale versus traitement classique
Cet essai multicentrique a été réalisé dans 40 centres psychiatriques pour enfants et adolescents au Royaume Uni. Il a recruté des jeunes de 11 à 17 ans ayant fait au moins deux TS. Leur âge moyen était de 14,3 ans, 89% d’entre eux étaient des filles et la proportion de ceux ayant réalisé au moins 3 TS était la même dans les deux sexes. Ces patients ont été randomisés pour bénéficier d’une thérapie familiale par un thérapeute expérimenté, ou d’un traitement habituel.
832 patients ont pu être inclus dans l’étude pour recevoir une thérapie familiale (n=415) ou le traitement habituel (n=417). Les caractéristiques des deux groupes étaient similaires à l’inclusion. Les participants du groupe thérapie familiale ont assisté à 6 sessions sur une durée de 5,1 mois (chiffres médians). Ceux du groupe soins habituels ont bénéficié de traitements plus variés allant d’un soutien psychologique à une thérapie comportementale. Un travail avec les familles était possible mais sans thérapie familiale formelle.
La thérapie familiale non inférieure aux traitements habituels sur le nombre d’hospitalisations pour récidive de TS
Il n’a pas été observé de différence significative entre les deux groupes quant au nombre d’hospitalisations pour récidive de TS à 18 mois (critère principal) : 28% pour la thérapie familiale vs 25% pour le groupe soins usuels (HR 1,14 [IC95% : 0,87-1,49], p=0,33).
Le nombre d’événements indésirables s’est montré similaire dans les deux groupes (54% vs 52%).
Les résultats aux questionnaires de dépression, de qualité de vie, de désespoir, de fonctionnement familial, de santé mentale des accompagnants et de capacité à exprimer des émotions n’ont pas non plus montré de différences significatives entre les groupes.
Une possible amélioration de la santé mentale
Cependant, les participants du groupe thérapie familiale ont rapporté moins de troubles comportementaux sur l’échelle SQD (Strengths and Difficulties Questionnaire), d’idéations suicidaires (échelle de Beck) et un meilleur fonctionnement avec les accompagnants familiaux (McMaster Family Assessment Device) par rapport à ceux du groupe soins habituels à 12 mois.
L’analyse coût/efficacité n’a pas montré non plus de différence significative, le coût de la thérapie familiale étant supérieur à celui des soins usuels, mais avec de meilleurs résultats cliniques.
Limitations
Étant donné la nature de l’intervention, patients et thérapeutes connaissaient l’attribution au groupe d’intervention ou contrôle, mais les chercheurs n’en avaient pas connaissance.
La forte proportion de participant perdus de vue limite la portée des résultats obtenus. Ceux-ci ne peuvent non plus être généralisés aux adolescents ayant fait une TS pour la première fois.

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