Réalisée dans un hôpital de Zagreb (Croatie) et portant sur une population de 301 patients (âgés de 18 ans ou plus) avec un diagnostic de « troubles du spectre schizophrénique », une étude évalue l’incidence des comorbidités somatiques chroniques sur l’évolution de la psychose, en particulier sur le risque de réhospitalisation. On constate que les maladies somatiques au long cours sont « associées avec des taux élevés de réhospitalisation » en service psychiatrique, et cela « indépendamment d’éventuelles comorbidités psychiatriques ou d’autres facteurs sociodémographiques ou liés au style de vie. » Les auteurs formulent plusieurs hypothèses sur la façon dont des affections chroniques (d’ordre somatique) peuvent modifier l’issue thérapeutique dans l’évolution de la schizophrénie.
Méprise sur la signification de la symptomatologie physique et mauvaise observance
Les patients éprouvant une souffrance physique plus importante ont en parallèle des risques plus élevés d’interrompre les traitements psychotropes, notamment parce qu’ils leur attribuent des interactions avec les médicaments nécessaires contre ces troubles somatiques. La coexistence entre troubles physiques et psychiques peut conduire les intéressés à une méprise sur la signification de la symptomatologie physique, prise à tort pour des effets indésirables des traitements antipsychotiques. Incitant les malades à interrompre leur traitement, cette erreur d’appréciation vient ainsi compromettre l’observance, d’où une augmentation mécanique du risque de réhospitalisation pour un nouvel épisode psychotique. Cela est d’autant plus préjudiciable qu’en raison de leurs problèmes physiques, les patients ont des difficultés à se rendre aux rendez-vous convenus avec leur psychothérapeute, et que cette mauvaise assiduité affecte alors l’efficacité des psychothérapies, parallèlement à la mauvaise observance des traitements médicamenteux. Par ailleurs, le sujet peut se trouver démobilisé pour s’investir dans une psychothérapie car il met davantage l’accent sur sa souffrance physique, et que la thérapie contre la problématique psychotique ne représente plus pour lui un objectif prioritaire. Enfin, dans le cadre de troubles somatiques passés à la chronicité, il est possible que « l’activation des réponses immunitaires » (imputable à cette situation) « aggrave le tableau clinique. »
Les auteurs s’appuient sur cette étude pour promouvoir « une approche intégrée » consistant à s’attaquer, en bloc, à la fois à la psychose et aux comorbidités somatiques chroniques : pour traiter efficacement la psychose, il est nécessaire de combattre simultanément ces comorbidités « de façon rapide et adéquate », car la dimension somatique doit être « considérée comme aussi importante » que le problème psychiatrique, et doit être mise « au premier rang » pour le traitement et pour la recherche, en intégrant ces deux aspects « en une seule entité. » Pour les auteurs, cette approche intégrée devrait même constituer « l’impératif dans la pratique clinique. »
Dr Alain Cohen
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