Livre. Pour la chercheuse Marie-Cécile Naves, Donald Trump, dans son style si particulier, souhaite délibérément réhabiliter un modèle de société fondé et construit sur la domination masculine.
Livre. Si l’actualité bouscule, il faut parfois prendre du recul. Les livres sur la folle ascension et l’année présidentielle de Donald Trump ont été massivement et même furieusement commentées. Ses décisions ont été disséquées. Ses tweets passés au crible des médias et d’auteurs d’Amérique ou d’ailleurs. Trop peut-être.
La chercheuse a choisi une analyse à distance, critique mais surtout sexuée
Ces derniers temps, la focale semble avoir toutefois changé de registre. Certains ont choisi de se fondre au sein de la Maison Blanche, au plus près du sujet, comme Michael Wolff, auteur du déjà best-seller Fire and Fury (Henry Holt & Co). D’autres, comme un collectif de vingt-sept psychiatres, se sont aventurés dans la tête du président pour s’inquiéter de son état mental.
La chercheuse Marie-Cécile Naves – docteure en science politique, spécialiste de la droite américaine, directrice de publication de chronik.fr – a choisi une analyse à distance, également critique, mais surtout sexuée. A sa manière, où l’accumulation de détails rend compte de la complexité du personnage, l’auteure redéroule avec minutie son projet, sa stratégie, sa politique intérieure et extérieure à travers le prisme du genre.
Caractère genré
Certes son machisme s’est largement manifesté dans ses commentaires sur l’apparence physique des femmes, sans parler de ses propos dans l’arrière d’un bus où il se vante d’avoir profité de sa notoriété pour commettre des agressions sexuelles. Néanmoins, écrit-elle, le caractère genré de l’action de Trump ne peut se réduire à ses relations personnelles avec la gente féminine : « Ses options politiques, son agenda, le choix de ses collaborateurs, la mise en scène de son pouvoir, le style Trump ont un point commun majeur : ils sont destinés à montrer que la masculinité hégémonique, visant la perpétuation d’un système patriarcal, est aux affaires et que, symboliquement, les hommes reprendront une place prétendument ou indûment perdue du fait des progrès de l’égalité entre les femmes et les hommes. »
Donald Trump a su s’entourer d’une vieille garde sexiste
Non sans réussite, et ce malgré quelques raccourcis hardis, Mme Naves parvient à nous faire partager comment l’homme qui a ravi la Maison Blanche à Hillary Clinton, la première femme arrivée si près du but, souhaite délibérément réhabiliter un modèle de société fondé et construit sur la domination masculine. Comment il a su s’entourer d’une vieille garde sexiste et capter le soutien indéfectible de ces « hommes blancs en colère », si bien décrits par le sociologue Michael Kimmel.
Comment aussi celui qui ne jure que par un âge d’or situé quelque part dans les années 1950 a déjà supprimé plusieurs mesures prises par son prédécesseur en faveur des droits des femmes : la transparence salariale dans les entreprises, les subventions aux ONG internationales dont au moins une des activités permet la pratique de l’IVG ou promeut son libre accès, etc.
Rien qu’à la Maison Blanche, le salaire médian féminin y est de 72 650 dollars par an, contre 115 000 pour les hommes. Un écart de 37 %, rappelle la chercheuse, presque deux fois plus important que celui constaté au niveau national. Ce qui veut dire beaucoup.
Trump, la revanche de l’homme blanc, de Marie-Cécile Naves (Textuel, 154 p.
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