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samedi 28 mai 2016

LIBAN L’infirmière est l’avenir du médecin (suite) LA PSYCHANALYSE, NI ANGE NI DÉMON


Nous avons vu la semaine dernière comment, comme le dit Didier Sicard, « les échographies, les scanners, les endoscopies, les scintigraphies ont confisqué la relation soignant/soigné à leur profit ». Du coup, le corps infirmier devient le seul corps soignant qui s'occupe du corps du patient. Avant que la technique n'envahisse tout, le médecin prenait le soin d'ausculter et de palper son patient. Aujourd'hui, seuls les infirmières et les aide-soignants le font. Le bain que donne par exemple l'aide-soignant au patient établit un lien d'une grande qualité entre eux. En psychiatrie hospitalière, l'infirmier et l'aide-soignant sont à l'écoute du patient mais aussi de son corps. Ce lien de type maternel permet au patient d'exprimer beaucoup de choses qu'il n'aurait pas pu dire autrement.

L'exemple qui suit dénote la puissance des identifications que subissent les infirmiers dans leur présence quotidienne, de 7h00 à 19h00.

Il y a dix ans, en 2006, nous venions d'ouvrir notre service de psychiatrie à l'hôpital Mont-Liban. J'avais du mal à expliquer au personnel le mécanisme de l'identification projective, mécanisme décrit par Mélanie Klein (1882-1960), qui fut le maître à penser de la deuxième génération psychanalytique mondiale. Mélanie Klein décrit ce mécanisme dans la relation précoce mère/nourrisson, à un âge où le nourrisson n'a pas d'identité propre. Une fusion avec la mère caractérise ce temps archaïque.

Nous recevons une patiente psychotique délirante. L'infirmière chef, enceinte au 9e mois, entre dans sa chambre. Assise sur son lit et jouant au tarot, tout de suite, la patiente lui dit :
- « Vous, vous détestez votre mère. »
- Surprise mais pas du tout impressionnée, l'infirmière chef lui répond : « Pas du tout, moi j'aime ma mère. »
- « Vous détestez votre mère, je le vois dans les cartes. »

Arrêtant la discussion, l'infirmière quitte la chambre de la patiente.
Le soir, en rentrant chez elle, sa mère lui ouvre la porte et s'approche d'elle pour l'embrasser. Elle la repousse en lui disant :
« Fous moi la paix. »

Abasourdie, la mère lui dit : « Mais qu'est-ce que tu as ? »
« Ne m'embête pas, je suis très fatiguée. »


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