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vendredi 8 avril 2016

Le « jet-lag » de l’heure d’été : tout dans la tête ?

Le Monde.fr  | Par Clémentine Thiberge

Le changement d'heure a eu lieu dans la nuit de samedi à dimanche 27 mars.
Le changement d'heure a eu lieu dans la nuit de samedi à dimanche 27 mars. Charles Krupa / AP

Le 28 mars 1976, la France passait pour la première fois à l’heure d’été. Quarante ans plus tard, cette mesure fait toujours débat dans l’Hexagone. Selon une enquête menée par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) début 2012, 40 % des personnes interrogées souhaitent le maintien de l’heure d’été, 21 % sont indifférentes et 38 % y sont défavorables.
Manque de sommeil, risque accru d’AVC ou dépression saisonnière. Ce changement d’heure serait désastreux pour notre santé. Mais que disent les professionnels de la santé ?

Aucun effet sur l’horloge interne

Pour Yvan Touitou, chronobiologiste et ancien président de l’Académie nationale de pharmacie, le changement d’heure n’a aucun effet sur l’horloge interne. Pour expliquer ce point de vue, le scientifique met en parallèle cette mesure et les voyages transméridiens : « Quand on parle de décalage horaire, le cycle biologique commence à être perturbé au bout de trois fuseaux horaires, soit trois heures, et la désynchronisation devient importante au bout de cinq. Une heure de décalage correspond à un vol Paris-Londres, ce qui est quasi insignifiant. »

Une heure n’est pas suffisante pour dérégler durablement le cycle. « On met en général deux ou trois jours à se remettre d’un décalage de trois heures et à peine un jour pour un décalage d’une heure », calcule le scientifique. Le dimanche suffit donc en général à stabiliser l’horloge interne.
Ueli Schibler, biologiste suisse spécialiste des cycles circadiens, le confirme :
« Notre cycle biologique est complètement capable de s’ajuster. Une heure de décalage n’affecte pas notre santé »
Selon Yvan Touitou, l’impact de l’heure d’été sur le sommeil n’est pas dû au décalage horaire. « Il est probable que le fait qu’il fasse jour plus tard entraîne des heures de coucher plus tardives. » D’où la légère désynchronisation qui peut-être ressentie par certaines personnes. « Je pense que les problèmes liés à ce changement d’heure viennent plus de la peur d’être perturbé, résume Ueli Schibler, pour faire simple, c’est dans la tête. »
Certains scientifiques avancent l’hypothèse d’une augmentation des AVC au moment du changement d’heure. « Ce pic n’a pas été prouvé et s’il y avait bien une augmentation des AVC fin mars, ce n’est en aucun cas lié au changement d’heure », répond Ueli Schibler.

Une adaptation progressive

Et qu’en est-il du rythme biologique des animaux ? Cette question se pose principalement dans le cas des animaux d’élevage qui subissent le rythme des éleveurs pour l’alimentation ou la traite.
Pour Thierry Roquefeuil, président de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), le changement d’heure ne pose pas de problèmes pour les vaches laitières : 
« Une heure ce n’est presque rien. Les vaches habituées à des horaires très rigides peuvent être légèrement perturbées mais s’adaptent en quelques jours. »
Mais pour lui, le problème principal vient des éleveurs :
« Mon cas est particulier : je donne à mes vaches l’habitude de ne pas avoir d’habitude. Comme je suis souvent en déplacement, je ne les trais pas avec une précision exacte. Mes traites peuvent varier de quelques heures, ce qui n’a aucun effet sur ma production. La rigidité vient du rythme que s’impose l’éleveur plus que du cycle des vaches. »
Pour ceux qui craignent un quelconque changement, les professionnels de la santé préconisent de s’adapter progressivement en amont du changement d’heure. En décalant les heures de sommeil pour les humains et en avançant la traite pour les vaches. Et cette année, grâce au lundi férié, les Français auront deux jours pour s’adapter. Aucune excuse, donc, pour arriver en retard mardi 29 mars au matin.

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