Afin de mettre un terme au "casse-tête récurrent" de la communication entre personnes ordinaires et porteurs de trisomie 21, une étude appelle la communauté scientifique à s'approprier la question. Parent pauvre de la recherche, cet axe de travail pourrait en effet jouer directement sur l'élaboration du parcours de vie.
Apporter les clés pour identifier les mécanismes d'apprentissage du langage et maîtriser les modes de communication des porteurs de trisomie 21 sur le terrain. Avec cet objectif en tête, le laboratoire grenoblois Gipsa-lab (pour Grenoble image parole signal automatique) s'est donc lancé dans un travail de recherche appliquée dont les conclusions viennent d'être publiées dans lerapport Communiquons ensemble*. En ressortent les faiblesses de la recherche mais également le manque d'application des conclusions par les professionnels de terrain.
Un manque qui inhibe les actions de terrain
Diagnostic et prise en charge, alternatives à la parole, adaptation de l'environnement... quelles que soient les portes d'entrées à l'amélioration de la communication entre personnes trisomiques et personnes ordinaires, le constat est le même : la communauté scientifique ne met pas assez les pieds dans ces sujets, notamment chez la population adulte. Un désintérêt qui, pour l'auteur de l'étude, influe directement sur les pratiques de terrain.
Au manque de recherches systématiques sur la parole et d'évaluation objective des thérapies, est ainsi associée "une utilisation réduite [...] des méthodes d'analyses de la parole [...] mais aussi d'outils de diagnostic et de thérapies basés sur ces méthodes". Quant aux effets du geste sur la parole et leur interaction, "très peu étudiés", ils sont quant à eux "encore mal définis et compris".
Trop d'élitisme dans la recherche
Également incriminé, l'élitisme des acteurs de la recherche. L'analyse n'est pas tendre. "Les personnes avec une déficience intellectuelle [sont] souvent considérées comme incapables de comprendre", soulignent les auteurs. Or l'accessibilité à la recherche constitue bien à leur sens un moyen supplémentaire pour explorer la problématique du langage et de la coconstruction de l'espace communicatif. Aussi les chercheurs appellent-ils entre les lignes à prendre exemple sur les pays anglo-saxons, dont les ressorts légaux contribuent à faire évoluer la démarche scientifique.
"L’exigence légale [...] d'obtenir le consentement éclairé des personnes pour participer à la recherche, qu'elles soient ordinaires ou déficientes intellectuelles, stimule le développement de travaux de recherche visant à l'adaptation de la recherche pour favoriser la participation et la compréhension des personnes avec déficience intellectuelle", précisent les auteurs. Or les outils à disposition (à l'instar de la norme française X 05-050 de mai 2000 relative aux pictogrammes) restent "encore peu utilisé[s] par les chercheurs et les journaux scientifiques".
Quels axes creuser ?
Au regard de la revue de la littérature, les auteurs du rapport ont identifié trois pistes de travail à investiguer. À savoir :- une recherche plus collaborative entre orthophonistes, chercheurs, personnes concernées et leurs proches ;
- une recherche sur l'évaluation des possibilités de rééducation de la parole chez l’adulte ;
- une recherche vers la mise en place d'outils de diagnostic et de prise en charge explorant les méthodes d'évaluation objectives et intégrant les nouvelles technologies.
* Travail de recherche réalisé dans le cadre du projet ComEns et soutenu par la Fondation internationale de la recherche appliquée sur le handicap (Firah) dans le cadre de son appel à projets 2013
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire