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samedi 26 mars 2016

Le SPH tient à rappeler qu'isolement et contention restent des prescriptions "possibles"



Par-delà les dérives isolées dans le recours excessif à la contention et à l'isolement récemment dénoncées dans l'actualité, le Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) rappelle qu'il faut se garder de "raccourcis et de caricatures" sur la psychiatrie. Et que ces pratiques restent pourtant des prescriptions possibles dans certaines situations.
Le Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) informe avoir pris connaissance "avec gravité" du rapport du 16 mars du contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) signalant un recours démesuré aux pratiques d'isolement et de contention dans un établissement psychiatrique de l'Ain. "L'usage de ces pratiques constitue un sujet de préoccupations au cœur des travaux du SPH et de sa société scientifique, la Société de l'information psychiatrique (SIP), auditionnés à ce propos par le CGLPL avant ces révélations", rappellent les psychiatres hospitaliers. Le syndicat relève également que la loi de Santé promulguée en janvier 2016 ambitionne d'encadrer ces pratiques en imposant la tenue d'un registre pour en tracer l'activité. "Mais pour que cette mesure permette réellement de réduire les risques de dérives, d'autres éléments constitutifs des conditions d'exercice doivent être examinées", appuie le SPH.

Des causes à rechercher aussi dans un contexte difficile

Cette récente actualité "ne doit en effet pas favoriser les raccourcis et les caricatures sur l'ensemble de la psychiatrie publique et sur ses patients", avertissent les PH en psychiatrie, pour lesquels il convient de resituer la question des pratiques dans l'évolution des demandes adressées à la discipline. Ils estiment que "le tournant sécuritaire symbolisé par le discours présidentiel de 2008 à Antony accompagne l'exigence sociétale du risque zéro, tandis que les mesures médico-économiques appliquées à la santé ont modifié les dispositifs de soins psychiatriques". Parmi ces modifications, poursuivent les membres du SPH, se trouvent "la diminution du nombre de lits hospitaliers non compensée par la création suffisante de solutions alternatives à l'hospitalisation [et] la protocolisation comme outil de gestion dans la santé qui se substitue aux élaborations collectives nécessaires en psychiatrie à l'analyse des situations cliniques complexes". L'insuffisance de formation initiale et continue pour les personnels soignants par absence de reconnaissance des spécificités de la psychiatrie fait aussi partie des facteurs de fragilisation des conditions de soins hospitaliers, selon le SPH. Ce dernier estime que l'usage excessif des mesures de contraintes est donc "le symptôme d'un affaiblissement de la réflexion clinique collective et d'un exercice professionnel dépassé par les injonctions contradictoires".

Des prescriptions restant "possibles" dans des cas particuliers

Cependant, l'isolement et la contention, "qu'il conviendrait de ne pas confondre dans leur application, tout comme il serait honnête de ne pas feindre de croire que la contention est l'apanage des établissements psychiatriques, sont bien des prescriptions possibles", appuie le SPH. La contention doit être considérée comme une "prescription brève et par défaut, par les psychiatres chargés d'en mesurer le rapport bénéfice/risque face aux excès et aux risques de certains symptômes", explique-t-il. L'isolement peut intégrer quant à lui, au sein d'une collectivité de patients hospitalisés dans un même service, le programme thérapeutique individuel d'une personne sans contrôle sur ses troubles, pour son apaisement et sa protection, expliquent encore les psychiatres hospitaliers. "Et de fait, la privation de liberté reste une particularité inhérente aux missions confiées par la société à la psychiatrie, telle que l'ont entérinée les lois encadrant les soins sans consentement et leurs réformes récentes", soulignent-ils.
Les recommandations* de la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, pour remédier aux dysfonctionnements constatés sont à observer, mais elles risquent de ne pas suffire si la situation de la psychiatrie n'est pas considérée dans son ensemble, estime par ailleurs le syndicat. Outre la mise en place du registre traçant les contentions et l'isolement, les moyens d'éviter les dérives de leur usage passent ainsi par "des locaux adaptés, des personnels formés et en effectifs suffisants, et des moyens pour mettre en place des activités thérapeutiques". Et le SPH de conclure que la lumière jetée par ce rapport devrait aussi être l'occasion de rappeler qu'une "veille continue sur la loi du 5 juillet 2011 et du 27 septembre 2013 est toujours nécessaire, puisque la société a également confié à la psychiatrie la tâche de priver de liberté certains de ses membres souffrant de troubles mentaux".
Caroline Cordier
* La réponse de la ministre des Affaires sociales et de la Santé au rapport du CGLPL sur le Centre psychothérapique de l'Ain (CPA) a été publiée, à la suite du rapport, au Journal officiel (JO) en date du 16 mars.
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